Le grand public a-t-il forcément mauvais goût ?

Il y a quelques temps est sorti le film Astérix et les jeux olympiques que je n’ai pas vu. Les critiques ont massacré ce film et globalement le public aussi même s’il fut très nombreux à se rendre dans les salles. Alors, là, je me suis demandé : est-il si courant que critiques et grand publics soient opposés que les uns et les autres ne s’écoutent plus. A moins qu’ils n’aient pas les mêmes buts quand ils vont au cinéma.

Qu’est-ce que le cinéma ? Ca dépend. Ca peut être un art avec des films très torturés, compliqués, soignés. Par exemple, j’ai regardé Le mépris avec Gabriel l’autre jour, film que je voulais voir depuis que j’avais lu le roman de Moravia, mon romancier préféré. Sur le coup, on est un peu surpris, on apprécie les prises de vues, le jeu de perspective… Mais c’est surtout le lendemain qu’on s’est dit que, ouais, il est quand même fort ce film. Un peu comme Mulholland Drive : on sort de là circonspect puis après réflexion, on se dit qu’on a passé un bon moment de cinéma.

Mais le cinéma est aussi un divertissement. Le cinéma pop corn comme on dit. On laisse le cerveau à l’entrée de la salle et on se laisse aller pendant deux heures, en espérant qu’on rigolera ou qu’on frissonnera, selon le genre. Aussi vite vu, aussi vite digéré. C’est un peu comme la BD, finalement, c’est un art avec du bon et du moins bon, du très soigné ou des traits simples…Dans le cas d’Astérix ou encore Bienvenu chez les ch’tis (que j’ai pas vu non plus mais après avoir lu tous les commentaires sur le sujet, j’ai plus envie de le voir, surtout que je connais la fin), c’est vrai qu’on va pas s’extasier sur l’image ou le scénario.Mais devinez quoi : c’est pas fait pour. Alors évidemment, quand on est critique de cinéma et qu’on est payé pour avoir une haute opinion du 7e art, on a du mal à s’extasier sur ce genre de films. Mais je trouve souvent qu’on oublie le but du film : divertir. Si je suis allée voir « Il était une fois » au cinéma, ce n’était pas pour réfléchir ou pour en prendre plein la vue, c’était juste pour passer un bon moment. D’ailleurs, il est pas mal du tout ce film, surtout pour les jeunes filles de notre âge, nourries aux dessins animés Disney à la Cendrillon ou la Belle au bois dormant.

Alors du coup, peut-on forcément conclure que le grand public a mauvais goût. Selon Bourdieu pour qui le bon goût est défini selon des critères bourgeois, oui, bien sûr. Mais soyons nuancés. Evidemment que des films grands publics ne réunissent pas les ingrédients d’un grand film, au sens artistique du terme. Mais peut-on réellement reprocher aux gens de payer 9 euros pour voir un film qui va les divertir durant deux heures ? Evidemment, on peut trouver déprimant le succès d’un navet intégral comme Astérix tout comme on peut regretter le succès de Cauet à la télé. Moi, ça, ça me navre vraiment. Mais d’un autre côté, moi aussi je regarde des merdes télévisuelles, je regarde des séries qui me font rire à leurs dépens, des émissions de télé réalité où on peut se moquer des candidats (Next ou l’ile de la tentation mais pas la star ac, faut pas exagérer non plus). Et puis y a parfois des documentaires qui sortent de l’ordinaire comme l’odyssée de la vie qui m’avait réellement scotchée.

Bref, pourquoi à tout prix brocarder le cinéma populaire ? D’autant que les films salement rabaissés aujourd’hui seront peut-être les films cultes de demain, un peu comme les Valseuses. Bon, après, y a des films qui sont universellement nuls, genre « on se calme et on boit frais à St Tropez ». Non mais déjà, qui a pu trouver un tel titre ? Rien que ça, ça donne pas envie de le voir. Mais finalement, même s’il est à peu près sûr que cet Astérix là ne restera pas dans les annales, y a quand même des gens qui l’ont apprécié. Si, si, j’ai vu des avis positifs ! Alors peut-on reprocher à ces gens là d’avoir un humour de merde et qu’ils devraient avoir honte d’avoir filé de l’argent à une daube pareille ? Et bien, si eux ont passé un bon moment, n’est-ce pas tout ce qui compte. Et puis être bon public, c’est une qualité, c’est agréable de pouvoir rire de tout, aussi.

16 réflexions sur “Le grand public a-t-il forcément mauvais goût ?

  1. Ah, l’éternel souci du succès ou de l’échec !
    Pour certains critiques, le succès est infâmant:pour appartenir à l’élite, ils estiment que leurs goûts ne doivent être partagés que par un très petit nombre de personnes…
    Mais à l’inverse, une masse de spectateurs ne garantit pas un film de qualité, critère ô combien subjectif. Surtout qu’avec l’éclatement des moyens de visionnage (TNT, DVD, VOD, etc), la mesure de l’audimat est toujours un peu bidon 🙁
    Alors comment juger si un film est bon ?… En laissant passer quelques semaines d’abord, celles de la promo, celles du bouche-à-oreille entre copains, celles du temps qui passe. Et puis noter si les phrases-cultes subsistent.
    Exemples:
    – Ah bah maintenant, elle va marcher beaucoup moins bien, forcèment.
    – C’est le nooooord.
    – Ecoutez Thérèse, je n’aime pas dire du mal des gens, mais effectivement elle est gentille.
    – Aux quatre coins d’Paris qu’on va l’retrouver éparpillé par petits bouts façon puzzle !
    Voilà ! Tu as remarqué ? Pas un souvenir de « on se calme et … » ni d’Astérix aux JO » ? Subjectivité, quand tu me tiens… 🙂
    Boujou!

  2. L’avantage du cinéma justement c’est qu’il nous transporte et je pense que l’art avant tout est dans la qualité du travail des acteurs, scénaristes et autres metteurs en scène. Le cinéma c’est une partie de la population, des gens comme tout le monde donc, qui cherchent à provoquer des émotions, des réflexions, faire passer un message… peu importe le moyen du moment qu’on y croit. Du moment qu’on est réceptifs. C’est un domaine à exploiter, sans fin. Tout comme la littérature, la peinture… Je ne sais pas ce que les récompenses comme ‘Cannes’ veulent dire… sur quoi se basent-ils ? C’est du flou. L’humain est tellement complexe qu’il peut être comblé par des films très différents, sur quels critères se baser pour en juger une poignée ?

  3. Pour avoir vu les deux (Astérix, avant de lire des critiques, les Ch’tits, après – on ne me la fait pas deux fois), ces deux films sont totalement incomparables.

    Un film sans prétention, une comédie populaire peut être extrêmement bien tournée, avec des acteurs talentueux, des dialogues qui font mouche, une intrigue efficace… et l’argent investi dans le film de garantit évidemment pas son succès (honnêtement, à part les moins de 12 ans et ceux qui avaient des intérêts dedans, je ne vois pas qui a pu trouver Astérix drôle).

    Après sur le côté film populaire / qui mérite d’être primé, pourquoi pas. Même si les répliques cultes et qui me feront encore marrer dans dix ans ne suffisent pas à mon goût à décerner un César à un film.

    Et sur les films plus intellos, juste pour rire, un exemple que j’ai trouvé absolument formidable et à qui j’aurais décerné sans peine une récompense. Tu me crois si je te dis que je l’ai détesté ?
    http://chipolata.canalblog.com/archives/2007/03/21/4377955.html

  4. Bon bah moi je suis juste d’accord, d’ailleurs je crois que j’avais dit à peu près ça dans les comms de ton article sur la critique. J’aime pas les pseudos-intellectuels qui méprisent la « masse » et ce qu’elle aime. (donc je soutiens Nino)

    Sinon je n’ai pas vu Astérix mais j’ai tendance à penser qu’il a aussi beaucoup souffert de la comparaison avec le film de Chabat…

  5. Je vous pas en quoi les films « pseudo-intellectuels » méprisent la masse, faut pas non plus tout inverser. La masse a quand même le chic pour mépriser le moindre truc qui nécessite un effort pour être compris. Personnellement, je n’aime pas cette division du cinéma que vous faites, et je lui en préfère une autre : le cinéma fait par passion, et le cinéma fait pour gagner du fric. Dans les deux branches, y a du bon comme du mauvais, mais on peut au moins les classer par échelle de valeur :
    – mauvais film fait pour gagner du fric (Astérix)
    – bon film fait pour gagner du fric (Star Wars)
    – mauvais film fait par passion (aucun ne me vient en tête, bizarrement)
    – bon film fait par passion (et là j’en ai trop en tête, re-bizarrement)

    Bon, après, ok, je vais ptet pas au cinéma dans le même état d’esprit que vous puisque je veux bosser dans ce milieu. Je ne saurais conseiller autre chose que d’arrêter de lire la critique, parce que même les Cahiers du Cinéma dont on dit tant de bien, ben c’est un peu de la merde qui lèche le cul des grands auteurs même si ils sortent un film médiocre et casse des films excellents. Soyez critiques vous mêmes, en gros 🙂

  6. Nina > Tu fais un rapprochement un peu rapide, ce n’est pas parce que beaucoup de monde sont allés voir le film qu’ils l’ont appréciés forcément… (sans que ce soit forcément représentatif, les critiques presse et spectateurs d’allocine mettent tous les deux 1 étoile sur 5)

    « C’est un peu comme la bédé, finalement, c’est un art avec du bon et du moins bon, du très soigné ou des traits simples… » C’est un peu comme tous les arts tu veux dire !

    Chipolata > Qu’est ce qui fait décerner un César selon toi ?

  7. Bobby : bon bah Nina vient de répondre…pour quelqu’un qui ne fait pas partie de la masse, tu as du mal à comprendre l’article et nos comms je trouve…peut-être qu’il nécessitait trop d’efforts pour être compris…

    E. qui fait partie de la masse!

  8. Il y a aussi le principe des « commandes » au cinéma (comme en bd d’ailleurs) souvent assez peu original. En bd il suffit de voir les bd sur les blondes ou bigard, toute avec le même style et un scénario qui se résume à un recueil de blagues trouvées sur internet.

  9. Heu, E., mon commentaire ne visait pas l’article de Nina mais juste ton commentaire. D’autre part, c’est pas parce que je suis pas d’accord avec toi et que je n’aime pas tes formulations que j’ai pas compris ce que tu disais. Je répondais même plus particulièrement à la phrase : « J’aime pas les pseudos-intellectuels qui méprisent la « masse » et ce qu’elle aime. ». J’ai associé, c’est vrai, les gens que tu qualifies de « pseudos-intellectuels » aux films « pseudo-intellectuels ». De manière générale, j’emmerde profondément la masse et ce qu’elle aime. Un film peut (doit ?) être divertissant et intelligent à la fois.

  10. Bobby : j’avais bien compris ton mépris t’inquiète…

    Au fait tu permets que je te tutoie j’espère car je vois que tu me vouvoies vu que ton commentaire ne visait que le mien…mais franchement le vouvoiement ça me gène ça me vieillit grave! 🙂

    Donc tu n’es pas d’accord avec le fait que je n’aime pas les pseudos-intellectuels puisque c’est à cette phrase que tu réagissais et que tu as très bien compris mon comm…

    D’autre part je te confirme qu’il n’y a pas lieu d’associer le terme pseudo-intellectuel avec les films vu qu’on en trouve aussi dans la musique, les programmes tv, les livres…tous ces gens condescendants qui nous disent quoi lire ou quoi écouter (cad SURTOUT pas la même chose que tout le monde, quelle horreur!) sinon c’est qu’on est stupides parce que c’est bien connu la masse est stupide…

    Heureusement qu’il y a des êtres supérieures comme toi! Et comme tu emmerdes la masse je suppose que tu ne restes qu’avec des gens comme toi ce qui doit beaucoup t’enrichir je n’en doute pas! 🙂

  11. Bobby: c’est ce que Nietzsche appelerait quelque chose comme « la tyrannie des faibles »… Mais attention, je fais une private joke de pseudo-intellectuelle là, et puis je cite Nietzsche, ce qui devrait, à ce que j’ai cru comprendre, faire de moi une snob qui se croit supérieure à la « masse »?
    Rhalala misère…. j’avoue avoir un peu bcp de mal avec le fait que dès que l’on suggère quelque peu aux autres de tenter de s’élever un peu, réfléchir sur soi, les autres, on devient automatiquement un vilain « pseudo intellectuel snob » qu’il méprise les autres.
    Il ne s’agit pas du mépris de « la masse », mais de la non-estime de ceux qui préfèrent stagner dans la médiocrité et ne cherchent pas à voir plus loin que TF1 ou l’ile de la tentation.

    Et l’attitude qui est vraiment méprisable, pour le coup, c’est celle qui vise à étouffer dans l’oeuf par son dédain méprisant toutes les tentatives de ceux qui essaient d’ouvrir à la réflexion et de transmettre un tant soit peu de culture (parce que la culture, si on la transmet pas et si on ne s’en sert pas, bah je ne vois pas vraiment à quoi elle servirait) aux autres, pour la seule et unique raison qu’ils se présentent comme détenant quelque chose (un savoir) que l’autre n’a pas, et que cela froisse la susceptibilité et l’ego de « la masse » qui ne veut pas qu’on lui dise ce qu’elle a à faire.
    Alors je ne dis pas que la culture de pur « divertissement » est à banir, loin de là, je connais dirty dancing par coeur, j’adooore les comédies musicales et j’ai lu (voire relu) tout stephen king, mais le truc est que je ne me limite pas à ça, je vais voir ce qu’il y a ailleurs, Audiard, Lynch et j’en passe. Alors oui j’ai pas tout compris à Mullholand drive, mais au moins j’ai essayé de le faire.

  12. Moi, je suis totalement d’accord avec Diane. On peut apprécier de mater un bon vieux navet qui détend le neurone et, à côté de ça, chercher à combler ses lacunes en cinématographie en matant des films plus sérieux. Je suis contre la médiocrité intellectuelle dans le sens où ça m’exaspère les gens qui ne font pas l’effort de sortir un peu de ce qu’ils ont l’habitude de voir et ça marche dans les deux sens. Une personne qui se contente de films dits « intellectuels » et crache sur les films populaires sans en avoir vu un seul ne me paraît pas plus estimable qu’une personne se contentant de films populaires parce que les films intellectuels, c’est chiant. Je pense que la vraie culture, c’est de naviguer entre le haut et le bas, si j’ose dire, pas de rester cantonné à une sphère.

  13. Eh ben, ça déchaîne les passions 🙂
    Concernant Bourdieu, ta phrase peut être mal interprétée : pour lui, si le grand public a mauvais goût, c’est en fonction du bon goût bourgeois, il ne reprend pas cette analyse à son compte. Perso, je préfère le bon goût Bourjois des lèvres des filles.
    Comme dit par Bobby et Diane, une autre explication, hors sociologie bourdieusienne, c’est celle de la majorité bovine, bourgeois comme prolos.
    Mais faut pas non plus systématiquement opposés films intelligents et populaires :Hitchcock, Verhoeven, John Carpenter, Burton…Ils peuvent être les deux à la fois. Et ce sont souvent les meilleurs films, ceux qui arrivent à ne pas être pontifiant tout en parlant à notre cortex et pas à notre cerveau reptilien.
    La seule revue de ciné que je connaisse qui défende cette approche « bicéphale », c’est Brazil, avec un petit côté fanzine bien sympathique.

  14. Et oui, nous ne sommes pas des êtres monolithiques. On ne se réduit pas à une étiquette d’intellectuel, de faisant partie de la masse, de ceci, de cela. Un être humain c’est beaucoup plus riche que cela. et heureusement! Imaginez un monde où on serait tout le temps pareil, où on n’aimerait qu’un seul type de trucs: l’horreur quoi!

    Diane, Nina, c’est officiel, je vous aime.

    Bon je retourne dans mon Jeune et Jolie. Après j’attaque Tolstoï.

  15. Bon, je réponds à contre coeur, parce qu’après c’est à n’en plus finir, m’enfin je vois pas où je t’ai vouvoyé, et mon ‘mépris’ (qui transparait sans doute à travers la phrase « j’emmerde profondément la masse ») aurait dû être ponctué d’un bon gros « LOL » pour que tu réalises que je dis ça au 17e degré. Je le saurais pour la prochaine fois (lol mdr).
    Et il me semble que je n’ai pas dénigré le divertissement, je dénigre par contre le divertissement qui n’aime pas l’intellect (je n’aime pas non plus l’intellect qui refuse le divertissement > oh mon dieu, figure toi que nous sommes d’accord, c’est fou ça, non ?)
    Bref, tout le monde dit la même chose, génial.

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