La tentation de Dante

Par Marine

La saga de l'été des vingtenairs

Ca vous est déjà arrivé, quand vous êtes avec quelqu’un, de vous demander si vous ne vous fourvoyez pas? Nina disait, la semaine dernière, que Ben avait beaucoup de qualités… Pour peu qu’il vive à Paris, il serait idéal. Moi ça me dérangeait pas. Je rencontre trop rarement des gens qui me plaisent. Mais, et si je rencontrais quelqu’un aussi bien que Benoît, mais à Paris, du coup? Ce serait pas un peu trop de
bonheur, ça?

Un soir, je suis invitée chez une amie, Sarah, pour son anniversaire. Prenant Audrey (une ancienne colocataire) sous le bras, je m’y rends. J’y rencontrai Dante (ce passé simple est dédié à Summer, je sais qu’elle aime qu’on emploie ce temps dans les articles). Dante, donc. Ouais vous foutez pas de mes pseudos, ils sont pas si éloignés que ça de la réalité. Dante il était beau. Il était grand. Il faisait de la musique. Il aimait les films d’action américains. Il avait un t-shirt orange avec Superman dessus. A ce stade de ma démonstration, je tiens à rappeler que non, Marine n’a pas 15 ans, mais bien 25. Dante il était marrant, et discuter avec lui dans la soirée fut très agréable.
Même moi je crois que j’étais classe. Quand on connaît mes mésaventures culottesques et épilatoire, on se rend compte que c’est beaucoup beaucoup BEAUCOUP, venant de moi.  J’étais assez chic. Et mondaine. Dans une soirée où je connaissais quasi-personne, la présence d’Audrey était salutaire au début. Celle de Sarah aussi, bien évidemment. Sa mère, avec ces pseudos que je donne à mes copines, j’ai l’impression d’être au collège. C’est vrai, quoi, qui n’a jamais été « amie pour la vie avec Audrey », ou trop adoré les Doc violettes d’une Sarah? Bref. Mais Dante, c’était la bonne surprise. Un mec bien. Intéressant. Sympa. Tout bien. A côté de ça, je m’en fous, j’ai un mec. Ouais il habite loin, mais c’est mon mec, jsuis sa nana. Ouaip ouaip. Avant la soirée, je me gargarisais déjà de ce statut de fille à copain, mais qui s’en vante pas, juste qu’il existe et que ça la rend radieuse. Première fois que je peux avoir cette posture, j’en jubilais. Même Sarah, qui la semaine précédente m’avait dit « tu fais chier, je voulais te présenter quelqu’un moi!!! », me rendait fière de moi. Eh ouais. Plus besoin!
Eh ouais.
Au détour d’une conversation passionnante avec Dante au sujet des films de John McTiernan, celui-ci me demande d’arrêter de parler, parce que, je le cite « la seule chose chiante que t’aies dite depuis tout à l’heure c’est ‘mon copain blablabla' ». Rire gêné. Mais merde, ouais mon Ben il est trop bien. Dante est pas mal, il est devant moi, mais Benoît, bien. Benoît, à moi. Moi, pour Benoît. Benoît, là avant. Benoît, plein de qualités mortelles.
Benoît loin.
Sarah en remet une couche. « Putain tu sais pas ce que tu rates, Dante c’est un coup fabuleux. Super agréable, attentionné, tout »
Rhhhhaaaaaaa je vais exploser!
Je tiens bon. « Dante, tu repars par où? » « Ah ben je vais du côté de *la place qui est à 20 mètres de chez toi* c’est là que j’habite. Si tu veux on rentre en taxi ensemble. Tiens mon numéro,
et mon mail, à l’agence de pub où je bosse. »  Ciel ciel ciel…

Non, je n’ai pas craqué. Ma culotte – LA guest-star de cette saga -, je suis la seule à l’avoir vue ce soir là. En fait, j’ai même pas pensé en termes de craquer. Du moins sur le vif. Quand je suis rentrée, j’ai fait un mail à Benoît relevant d’un body call caractéristique. Réussi en plus. Un truc que seule une fille à 2 doigts du coma éthylique pourrait écrire. J’étais contente. Mon Benoît il était drôlement bien. Et drôlement chic. Et drôlement intéressant. Et drôlement rigolo. Et drôlement loin.  Ca c’est ce que j’ai pensé au réveil, entre « aspirriiiiiine ma têêêêêteuh » et « où sont les toilettes ».

Bordel mais quelle conne. Y a un mec bien juste en bas de chez moi. Mignon. Bon coup. Fan de moi. Mais qu’est-ce que j’ai fait????? Et là j’ai regretté. Je me suis demandé ce qui clochait chez moi, de ne pas être foutue de trouver un mec bien pendant des années, d’en trouver 2 coup sur coup en l’espace d’1 mois, et de choisir celui qui habite à 6000 km. Ouais je me suis trouvée conne. A bouffer du foin.
Ce que je n’ai pas fait, d’ailleurs, le foin aurait trouvé aussi sec le chemin des chiottes via mon oesophage. Oui, j’étais malade. Personne n’était disponible pour me parler. Or laisser quelqu’un ruminer pendant sa gueule de bois, chers lecteurs (vous 6), c’est in-ter-dit. INTERDIT.

J’ai bad-trippé pendant toute une soirée, partagée entre une envie terrible de parler avec Benoît, un énervement croissant à son égard, pour tout ce qu’il était, et l’envie d’appeler Dante.
Le lendemain – je n’avais toujours rien fait, trop déprimée et malade pour ça – je parlais avec Benoît. Enfin… je MSNais avec lui, donc, vu que mes exploits digestifs du week-end m’avaient tellement détruit la gorge que j’arrivais ni à parler ni à avaler la moindre nourriture. Envie de pleurer, en face, il est de bonne humeur. Il se fout de moi, il me taquine, il est gentil. Il m’énerve. Il est adorable, je le trouve insupportable. Il me console, je l’envoie chier. Il me fait livrer un repas, je lui dis que je suis mal par rapport à Dante. Ce que je vomis, désormais, ce sont des mots.
Il est abattu, je me sens mal. Il essaie de me comprendre, je n’arrive plus à trouver mes mots. Il pense que je lui demande de me larguer, je panique. Bordel mais quelle conne. Y a un mec bien juste en face de moi. Mignon. Bon coup. Fan de moi. Mais qu’est-ce que j’ai fait????? Et là j’ai regretté. Je me suis demandé ce qui clochait chez
moi, de ne pas être foutue de voir quand un mec est un mec bien. Je me serais giflée. C’était ce genre de crypto-mélodrame que seul Internet sait créer. Je parlais la semaine dernière de l’importance des téléphones portables dans l’expression des sentiments amoureux (et surtout lubriques, il faut bien l’admettre). Pour cet épisode, ce sera la webcam. Je voyais Benoît encaisser et être mal. Et moi je me sentais plus légère. Facile, non? Tout cela restait silencieux. Ni lui ni moi ne parlions. On se voyait mais nos réactions restaient sans paroles. Putain mais faut pas laisser quelqu’un ruminer pendant une gueule de bois, c’est IN-TER-DIT!

Dante, je l’ai plus revu. C’est lui qui a pas donné de nouvelles.
Benoît, je l’ai revu. Des nouvelles, ça oui, j’en ai eues. J’en ai donné aussi.
Ce soir-là, à la soirée de Sarah, pour la première fois de ma vie, j’avais quelqu’un dans ma vie. Première fois que j’ai cette posture. Je pensais jubiler, mais le lendemain, ça m’a fait peur comme jamais.

14 réflexions sur “La tentation de Dante

  1. Ma reine, ma pauvre… tiraillée comme jamais.
    C’est marrant ce coté pusillanime des nanas qui ne veulent pas initier une relation, prendre les choses en main, peut-être en pensant qu’on va les considerer comme des allumeuses. Ce qui n’est pas un mal quand on est face à un shy guy. Tiens je te ferais un p’tit article un de ces jours à ce sujet. N’hésite pas à me le rappeler !

  2. Ah là là, je sens venir la girlie evening oussque les filles vont :
    – dire du mal de tous ces salauds ooooooo
    – échanger plein de « secrets de girl »
    – se serrer les coudes avec moult conseils, diatribes, dithyrambes, t’ceuteura.

    et pendant ce temps, les mecs de
    – partager des blagues crades
    – devant un match de foot où il exigé d’insulter l’arbitre
    – parler boulot, finance, projets, problemes, refaisage de monde, tceuteura…

    Ah c’que c’est bon ces moments là…

  3. si tu savais le nombre de blagues crades qu’on peut faire entre nous Lucas. D’ailleurs le seul mec qui est parti en vacances avec ma bande de copines cet été nous a même dit plusieurs fois qu’on étaient « trash ». Le pauvre je crois qu’il était à la limite du traumatisme.

  4. Juste un avis au passage d’un blog excellent, prends les bonnes occasions qui se presentent, 6000km, si ca vaut le coup ca repartira tout seul quand il rentrera… RATES pas des bonnes occazs bordel !!! lol Et puis ce Dante avait pas l’air d’un salaud, tant qu’il est doux et attentionne…mafoi pourquoi pas ? Ca evite les regrets si on le desire vraiment.

  5. Bon allez je me dévoue pour faire le pépé de service: je m’inscris en faux contre le commentaire de Fatche, se lancer « juste pour le goût » avec un mec du coin, planter l’autre là sous pretexte qu’il est temporairement indisponible et se dire « boarf pas grave au pire je le reprendrai après »… je trouve ça répugnant. Et parfaitement égoïste. Le concept du « on est jeune, on profite » n’excuse pas tout. Choisir c’est dur, OK. Mais c’est mieux que cet espèce de non-choix. Pas de regrets oui, mais juqu’à quel prix? Et ce type de comportement évite-t-il vraiment les regrets?

    Bon courage en tout cas… et texte très agréable, comme d’hab’ !

  6. Je me suis fait mal compris, desole. Je parle pas de faire sa pouffiasse en couchant avec tout les mecs qui passent sous pretexte que l’autre est a perpet’. Ensuite je le remet, je passe juste alors je sais pas depuis combien de temps vous etes ensemble etc…, si c du serieux, il n’y a meme pas de question a se poser, ou sinon c pas du serieux… et dans ce cas, pourquoi pas craquer pour un nouveau venu (Occaz = serieux gars gentil et attentionne = peut ete bonheur)… En tout cas, je ne pensais pas de prendre les mecs pour des jouets, qu’on brise et jette.

  7. Je crois surtout que là est le noeud du problème en fiat, arriver à déterminer si le Ben c’est du sérieux ou pas…
    Et +1 avec ta dernière phrase, même si évidemment formulé comme ça on ne peut qu’être d’accord…toute la difficulté c’est de ne pas se comporter en ruffian « sans (vouloir) s’en rendre compte »!

  8. Je souscris au commentaire de serpentgarou, autoproclamé pépé de service.
    Ce type de dilemme est compréhensible, mais l’être humain « moderne » (devrais-je plutôt dire l’occidental nanti ?), confronté au sur-choix et à la logique consumériste à tout crin, en arrive à douter de tout, à ne plus savoir choisir, s’engager, sceller ses choix. Être à deux, c’est se résigner quasi-quotidiennement. Une résignation extrêmement difficile à accepter dans une société qui nous susurre PARTOUT, via les médias, le divertissement, la rue, les amis : « profitez, ne vous prenez pas la tête ». Pour la chimère que l’on sait : « consommer vous rendra heureux ». Même conscients de cette marche du monde, on ne peut s’y soustraire sans devenir marginal.
    Je ne juge pas, je comprends à 200% ce type de comportement que je ne vis que trop souvent. Mais cela me rend putain de triste… Comme si la vie devenait une sorte d’Ile de la Tentation géante. Ce qu’elle a probablement toujours été, après tout, mais qui se dévoile et s’étale aujourd’hui sans honte, à l’ère de l’ultra-communication, dans un cynisme décomplexé qui fait froid dans le dos.

  9. Bien sûr qu’à un moment ou à un autre, on est tous conforontés à ça et je dirais même que c’est mathématiques : tu es in love donc rayonnante donc tu attires. C’est évident.

    Maintenant, je pense que tu as agi comme il fallait. Dante avait des qualités, je n’en doute absolument pas mais pense qu’il avait en plus le charme de la tentation, du fruit défendu. Aurais-tu été tout autant attiré par lui si tu avais été célibataire ? Bon, ben, on pourra jamais savoir.

    Après, ta réaction prouve que tu as fait le bon choix, pour moi. Tu as été malade à l’idée de blesser Benoît, c’est donc que tu ressens quelque chose de très fort pour lui, sinon, tu aurais été juste ennuyée. Perso, pour moi, céder à la tentation n’est qu’une solution de facilité, je suis fière de toi, poulette!!

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