L’instinct de l’art

L’art, vaste sujet s’il en est. Tout être humain, quelle que soit sa culture, son vécu a une sensibilité à l’art, dans le sens large du terme. Evidemment, on a tous des préférences : je suis plus musique que cinéma, j’aime la photo, la peinture de la Renaissance italienne, la littérature mais pas tout… Bref, en matière d’art, aucune œuvre ne fait l’unanimité, on aime ou pas, on peut expliquer nos goûts et dégoûts si on nous demande (quoi que…). Parce qu’au fond, l’appréciation de l’art reste instinctive, du moins pour moi.

Le cas le plus flagrant de mon instinct en matière d’art concerne l’art contemporain (vaste mot pour désigner des choses très très différentes, je sais). Je n’ai jamais fait d’histoire de l’art, j’ai quelques connaissances mais elles ne sont pas pointues. Du coup, quand je vois une œuvre abstraite, elle me parle ou pas. Quand je vais à une expo, je préfère ne pas connaître d’abord la démarche de l’artiste pour ne pas me laisser polluer. Je sais, ça paraît un peu illogique : comment peut-on apprécier une œuvre si on ne connaît pas le processus qui l’a fait naître ? Mais moi, j’aime d’abord voir, me faire un avis instinctif et apprendre après le pourquoi du comment. Je ne suis pas une technicienne de l’art, je ne suis pas émue devant un Dali parce que de prime abord, ça ne me parle pas. Ses œuvres ne me laissent pas indifférente puisque quand je les vois, je ne me sens pas très à l’aise, c’est dérangeant et là, on peut au moins dire que l’artiste a déclenché une émotion. Mais me taper un musée Dali, je suis pas sûre. Alors dire qu’on n’aime pas Dali, c’est un peu un sacrilège mais c’est instinctif. De la
même façon, j’en ai parlé à Summer l’autre jour qui m’expliquait que petite, elle était allée voir une expo Van Gogh qu’elle avait détesté. Et c’est vrai que Van Gogh, ça fout vraiment mal à
l’aise à regarder.

Alors évidemment, si je dis que j’aime pas Dali et qu’on me traite d’inculte, honnêtement, oui. J’ai vraiment un fond minuscule de connaissances sur le sujet mais je pourrais pas soutenir une vraie conversation sur le sujet. Mais on aura beau m’expliquer sa technique, sa démarche, la symbolique d’un des tableaux, ça ne changera rien au fait qu’instinctivement, je n’aime pas. Je parle peinture mais ça marche pour tout. La musique par exemple. Quand j’achète un CD, je l’écoute d’une traite : si aucun titre n’accroche mon oreille c’est mauvais, mauvais signe. Comme je suis magnanime, je refais une écoute mais pas de doute : mauvais album. Et parfois, une écoute et je suis bouleversée, poils qui se hérissent, émotion. Récemment, j’ai écouté Erika Janunger et là, énorme coup de foudre. Bien sûr, je change d’avis parfois, une chanson que j’aimais pas de prime abord et à force de l’entendre, je finis par bien l’aimer mais je ne l’adorerai jamais, ça, c’est certain.

Allons plus loin. Parfois, la connaissance « scientifique » d’une œuvre artistique peut gâcher le plaisir. Quand on regarde/écoute une œuvre en étant attentif à la technique, en la replaçant dans la vie de l’artiste, on s’attache parfois trop aux détails et pas assez l’œuvre en elle-même. Les détails ont leur valeur, oui, mais ils sont à étudier dans un second temps. Par exemple, quand je regarde un De Vinci, je prends d’abord connaissance du tableau en entier avant de chercher le détail, le sfumato… Tout comme un morceau de musique, je l’écoute d’abord avant d’être plus sensible à la rythmique, au travail de tel ou tel instrument, la production… C’est comme la cuisine. Quand je mange un plat, je me régale (ou pas), je m’amuse pas à deviner quelles sont les épices dans la sauce et en déterminer la proportion de chaque. Si je trouve ça trop délicieux, je demande la recette. Sinon tant pis, je cuisine jamais de toute façon. Bon, évidemment, des fois, connaître la vie de l’auteur permet de donner un éclairage encore plus intéressant sur sa vie comme là, je lis un livre sur l’enfance de Moravia, un livre-entretien qu’il a eu avec sa deuxième épouse, Dacia Maraini. Ben je le trouve encore plus fascinant. Non pas qu’il ait eu une vie fascinante mais juste que ça le rend encore plus humain. Mais en lisant ses romans (j’en ai encore en attente, héhé), je n’y penserai peut-être pas.

12 réflexions sur “L’instinct de l’art

  1. Avant tout: merci Nina de cet article au sujet intéréssant et intemporel, qui fait marcher nos méninges et nos élans métaphysiques.
    La question éternelle du beau, de l’esthétique. Qu’est ce qui rend une chose belle? Le beau, c’est subjectif, ok, mais alors pourquoi, 99% des gens de cette planète, en regardant une aurore boréale ou en écoutant le requiem de Mozart, prendront automatiquement un air bovin et profond pour ahnaner en soupirant un extatique « c’est beeeauuuu…… »
    Après, le beau, en ce qui concerne l’art, réside davantage dans le traitement (vocal, sculptural, littéraire, poétique…) de la matière, et non dans la matière elle même. Ce que Baudelaire a tenté de faire en tirant les fleurs….du mal, ce qu’Hugo a appelé le « sublime d’en bas », ce que tentaient de faire rimbaud (ahhh cet ignoble vers: « belle hideusement d’un ulcère à l’anus »…) ou encore Chardin en peignant un poisson mort à la perfection (la raie)…

    Et j’ajouterais à cela que bien souvent, on n’aime pas les choses que l’on ne comprend pas. Bien sûr ce n’est pas valable pour tout, j’avoue que j’aurais du mal à concevoir, malgré toutes les explications artistiques du monde, que l’urinoir de duchamp puisse être « beau », mais les années passant et me penchant de plus en plus sérieusement sur les choses, je réalise que j’apprécie aujourd’hui Mallarmé, Valéry ou Proust (que je honnissais dans mes années collège/lycée) parce que j’ai pris le temps de les étudier en détails et de comprendre comment ils fonctionnaient.

    Alors oui, tout le savoir « technique » peut certes enlever un côté « spontané » et naif quant à l’approche première de l’oeuvre d’art, mais je trouve personnellement que la beauté jaillit également, voire même surtout, de la compréhension de l’oeuvre et de sa conception.

  2. Allez, une petite citation juste pour l’effet d’anonce: L’art conteporain c’est l’art de faire le con en esperant que celui qui regarde soit inteligent ». C’est d’Audiard.

    Pour etre plus constructif je dois admettre etre specialement terre a terre, admettons que si jamais il se met a pleuvoir je prefere lire « il pleut » plutot que « le ciel assombri de trop de gouttes s’en vint decider de se liberer de ce trop lourd fardeaux en laissant tomber sur le frele sol ses immenses etendues d’eaux. » (bon je force le trait). Cela fonctionne egalement avec la peinture, le cinema, la musique..

    Pour finir je dirais simplement que bien souvent l’art, et je vise essentielement la peinture, enfonce des portes ouvertes mais avec les formes. Apres mon avis n’est pas buté, ce que je connais de la peinture de notre siecle se limite a Dali, qui est a l’art ce que BHL est a la philosophie, et autres guignols mediatisés. Ceci dit c’est un point a creusé.

  3. Avant tout, j’ai adoré la vidéo, ça m’a rappelé les films de Cocteau et d’une autre cinéaste surréaliste dont j’ai oublié le nom. Ce jeu sur la danse et la pesanteur me fascine…

    Pour ce qui est de l’Art, j’ai longtemps pensé -à la Kant- qu’il y avait une subjectivité objective (ou objectivité subjective, je sais plus) concernant le jugement de ce qui est Beau. Jusqu’à très récemment. Peu à peu je réalise que mon point de jugement, c’était moi, et que du coup, si tu aimes ce que j’aime, tu as bon goût, si tu n’aimes pas, tu n’y connais rien.
    J’essaye peu à peu de me dire : « non non, chacun ses goûts ».
    Mais attention, faut pas pousser non plus hein. Quelqu’un qui n’aime pas Baudelaire ou Proust (ou Bergman, n’est-ce pas Bastien ;D) va me saouler grave, et de l’autre côté, je pète un câble si j’entends que Lorie est une artiste.
    Alors, l’Art, objectif ou subjectif ? J’avoue avoir du mal à me trouver une opinion :S

  4. Bastien, je suis atterrée. C’est pas la première fois, mais là, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase… Je suis pas spécialement fan de Dali, mais la comparaison avec BHL me fait franchement chier.
    Et je pense que tu peux enlever ton « pour être plus constructif », parce qu’au final tu ne fais que donner un point de vue et ça ne fait pas tellement avancer le schmilblick (oui, ça c’est parce que je suis chiante ET énervée par tant de connerie).
    (même que j’ai dû faire une recherche sur Google pour trouver l’orthographe de ‘schmilblick’, en plus)

  5. Pourquoi tant de haine ? Surtout que je finirai par apprecier ca ^^ Bon pour l’humour j’arrete la promis. La comparaison avec BHL est tout a fait reflechie, un type mediatisé cachant la foret (car j’imagine qu’il y a du bon dans le surrealisme, pour ceux qui apprécient), pote avec les autres gars mediatiques de l’epoque et mariée a une miss connue genre jet set de l’epoque. Je ne comparais pas les oeuvre, on ne peut pas comparer un peintre surrealiste a un philosophe de menagere, je ne pousse pas le vice a ce point.

    Si tu veux que je te ponde une these sur le pourquoi je n’aime pas le surrealisme, sans provocation gratuite et sans humour je peux le faire si tu veux, et tu verras que le « pour etre constructif » peut devenir plus utile d’un coup.

    PS: a vrai dire je ne savais meme pas qu’il existait une orthographe officiel pour « schmilblick' » (que je copie colle de ton message pour eviter les fautes ^^ )

  6. Etant très curieuse, j’ai envie de dire : oui, vas y, pond moi ta thèse.

    Argumenter longuement en faveur d’un goût personnel de type « j’ai trois poils au cul et j’aime pas le surréalisme » doit être terriblement audacieux, j’ai donc hâte de voir ça.

    [mode haine : OFF]

  7. Diane : Je doute que 99% des gens de cette planète s’extasie sur le requiem de Mozart par exemple, pour la bonne raison que ça fait appel à tout un corpus culturel que ne possède pas les autres cultures, justement. Tout comme un auditeur français lambda trouvera sans doute assez insupportable un concert de gamelans balinais. Sans compter que je ne sais pas si la conception du beau qu’on peut avoir en Occident (oooh, le joli paysage, par exemple) est la même dans d’autres parties du monde.

    En dehors de ça, je vois apparaître plusieurs fois la notion de beau. Perso, je ne pense que l’art a un rapport avec le beau. L’art provoque des émotions, provoque des réflexions (sur soi, sur la société, sur notre rapport aux autres, etc). Mais beau, je ne pense pas, surtout que la notion de beau évolue avec les époques. En fait, j’ai l’impression que la mise en avant du « beau » par rapport au reste me semble la caractéristique d’un art bourgeois, inoffensif et qui surtout ne dérange pas et ne cherche pas à penser le monde.

    Personnellement, j’aime bien intellectualiser aussi l’oeuvre d’art. C’est un peu comme un tour de magie : ça ne gâche pas mon plaisir de connaître le truc (puisque je sais qu’il y en a un de toute façon), mais au contraire ça l’augmente puisque je peux m’extasier devant l’habileté et l’ingéniosité du magicien. Pour l’art, c’est un peu pareil. Dans l’art non-contemporain, il y a à la fois le plaisir esthétique tel qu’on l’entend classiquement (puisque des oeuvres dérangeantes et jugées laides au moment de leur création ont fini par être jugées belles avec le temps, l’art contemporain d’une époque modifiant le goût de cette même époque) et le plaisir intellectuel de comprendre le contexte de l’oeuvre, sa signification à l’époque, etc. Pour une oeuvre contemporaine, le plaisir intellectuel est le même, augmenté du fait que les thèmes de l’oeuvre nous parlent directement. Pour le plaisir purement esthétique, c’est effectivement plus délicat et ça demande plus d’efforts.
    Ca me fait penser au pantalon remonté sur une jambe des zonards. On voit ça, le réflexe c’est « ahah, quelle bande de ploucs ». Sauf que quand on apprend qu’à l’origine c’était une référence aux esclaves qui étaient attachés par des chaînes à la cheville, ça prend tout de suite plus d’intérêt et ça change le regard que l’on porte dessus (même si ceux qui le font n’ont sans doute pas tous conscience de l’origine du truc).

    Bon, je pourrais encore écrire des tartines, mais vous devez déjà être saoulés 🙂

  8. Je tiens a prevenir qu’il risque d’y avoir des grands mots dans ce post. On va surement encore me repondre « ca cache » le vide et tout et tout mais bref, j’espere etre concis et surtout clair, desolé d’avance si ca n’est pas le cas.

    Le surrealisme est definit par Andre Breton lui meme comme l’expression non rationnelle et non raisonnée de la pensée. Ca me pose deja un probleme a la base etant quelqu’un d’extremement rationnel, terre a terre, tout ca. A coté de ca le surrealisme decoule du romantisme. Ca tend a le depasser, a cacher le neant romantique par l’abstrait et la simple pensée surrealiste. Je ne suis pas fan du tout du romantisme, encore une fois a cause de l’eloignement d’un recherche rationnelle et egalement pour la notion d’inconscient (ou n’importe quel autre mot de l’epoque desigant cette meme notion) superieur a l’etre conscient. Sans rentrer dans des debats psycho philosophiques de comptoir je me contenterais d’annoncer mon desaccord avec cette vision.

    Pour finir sur les bases du surrealisme, les grands penseur ayant inspirés les surrealistes sont Freud, Mesmer, Marx, Rimbaud… des types que je ne respecte pas pour leurs pensées. Marx avant tort sur la majeure partie de son propos, toute sa pensée decoulant de « la lutte des classes est le moteur de l’Histoire » ce qui n’est pas forcement veridique, voire meme faux, Mesmer etait un espece de sorcier voodoo version occidentale et Freud je pourrais passer des heures a disserter sur le pourquoi son oeuvre est l’une des plus grosses erreurs grave en consequences de notre ere. De lui a Lacan ou Dolto la psychanalyse se perd. Ca n’est pas pour autant que je suis un behaviouriste, entendons nous, il existe un juste milieu. En realité l’un des rares psychanalyste avec lequel je sois pas mal d’accord est Kandel, et bizarrement c’est un scientifique plus qu’un psy a l’ancienne.

    Fin la je m’eloigne un peu mais je prefere argumenter chaques stades de ma pensée pour etre le plus clair possible.

    Donc voila en gros le pourquoi de mon desaccord profond avec la pensée surrealiste. Ensuite sur la forme je trouve ca niais, pompeux, branlette intelectuelle, inutile, ouvrant des portes ouvertes… tout ca quoi, et par consequent je ne respecte ni cet art ni les artistes qui le pratique. Du cinema de Bunuel a la peinture de Magritte en passant par Eluard, Aragon, Julien Gracq, Frida Khalo… et je parle en ayant lu/vu les oeuvre de ces personnes.

    J’ai fait un brin long desolé, mais si jamais il y a des points que tu souhaite me voir eclaircir, si j’ai oublier quelque chose ou si simplement tu as une reponse a fournir qui necessiterait egalement une reponse de ma part je m’en ferai une joie.

    Je precise une petit chose pour finr, j’ai beau etre totalement hermetique au surrealisme il y a certaines choses que j’appreci. Exemple simple, je fais souvent des cadavres exquis avec les gosses que j’ai en colo, c’est ludique, sympa, agreable… tant qu’on cherche pas a caller du sens metaphysique derriere ca me va quoi.

  9. Bastien : Marx avant tort sur la majeure partie de son propos, toute sa pensée decoulant de « la lutte des classes est le moteur de l’Histoire » ce qui n’est pas forcement veridique, voire meme faux

    Tu as lu autre chose que le Manifeste du Parti Communiste ? Parce que si effectivement le point que tu cites est discutable, ce n’est que la partie émergée de l’iceberg !

    Par ailleurs, tu as oublié de dégommer Rimbaud en une phrase.

  10. Je ne vois pas le rapport entre le fait que tu n’apprécies pas le surréalisme et le fait que tu sois terre à terre. ON parle d’art et pas d’ésotérisme. Je ne crois pas en Dieu, ça ne m’empêche pas de beaucoup apprécier les arts religieux. Je vois pas non plus le rapport avec les cadavres exquis que tu fais en colo… Tu ne sais pas de quoi tu parles, wikipedia n’est pas une source de connaissance sûre…

    Et la pique mesquine en début de comm, tu pouvais t’en passer mais puisque tu me cites indirectement alors que je ne fais pas partie du débat, je te répète aussi une autre partie de ce que je t’ai reproché : arrête de prendre les gens de haut, tu n’es pas détenteur d’une vérité universelle.

  11. Et que dois-je te répondre, maintenant ? Bravo Bastien, tu as, comme promis, pondu ta petite thèse expliquant pourquoi tu n’aimes pas le surréalisme (ce qui t’autorise de toute évidence à associer Dali à BHL) ? Ok, génial, bravo Bastien. La prochaine fois que tu apportes des arguments, essaye de défendre autre chose que ton petit point de vue (dont au passage, je me fiche carrément), évite de venir pourrir mon blog si c’est pour venir étaler ta science et tes expériences sexuelles, apprend à écrire en ne faisant pas une faute minimum par phrase (et encore je suis gentille), et reviens me parler dans quelques années. Bref, je sais pas qui tu cherches à impressionner (à part toi-même) mais ça ne prend pas vraiment. Un peu de légèreté ne te ferait pas de mal.

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