Le crachoir ou l’origine de ma lose

Par Keira

Cela fait déjà quelques années que je cultive cet art si précieux qui m’a permis de nouer des liens avec d’étranges individus.

Il faut, pour commencer, avoir une bonne grosse dépression nerveuse pendant votre adolescence. Ca permet de mettre en place de bonne bases de manque de confiance en soi et tout ce qui va avec. Que ce soit le manque de relations, la peur de l’autre et la phobie du futur.

Après avoir découvert un substitut à vos problèmes, qui dans mon cas s’est appelé internet, et rencontré via des forums, un bon paquet de gens dans votre cas, prenez soin de prendre rendez-vous avec un psy-psychopathe qui vous terrorise tellement que vous décidez de retourner passer votre bac après trois mois d’absence au lycée.

Finalement vous arriverez sans doute à passer le bac sans problème grâce à une chance de cocu. Que vous ne pouvez pas être car toujours désespérement seule.

Votre bac en poche vous refusez la pression parentale qui vous voit diplômée de Science-Po dans un futur proche pour vous orienter en fac de cinéma-audiovisuel.

Vous y rencontrez plein de gens bien et vous amusez follement. Vous rencontrez aussi votre premier connard. Que vous larguerez d’une manière aussi minable que le mec. Mais ça vous fera toujours plaisir des années après.

Après trois ans sur les bancs de la fac, un autre petit ami (cette fois beaucoup plus réussi), des flirts et compagnie, vient le moment de se dire que finalement la fac ne sert à rien. Mais ne croyez pas que cette réalité vous soit venue naturellement, vous êtes un peu trop stupide pour cela. Non, vous avez reçu l’aide de connard numéro 2. Celui-là vous ne vous y attendiez pas à son côté connard. Certes, votre mère ne le sentait pas, mais bon… faire confiance à 200% au jugement de sa mère, il faut du temps pour l’accepter. Et vous n’étiez visiblement pas prête.

Erreur de débutante là encore. Vous vous laissez entraîner dans un cycle infernal qui vous fait quitter à la fois la fac et votre maison familiale pour vivre avec des potes et votre mec. Autant dire que l’évolution psychique = zéro et que l’évolution de votre pourcentage de matières grasses dans le corps monte en flèche.

Après un an et quelques mois passés à ne rien faire (sauf cas de grande urgence financière), votre connard et vous ne vous sentez pas en osmose totale et vous retournez chez vos parents. Deux mois après Noël, jackpot, vous êtes cocufiée comme jamais, tout le monde le savait mais personne n’a eu la courtoisie de vous prévenir. Et cela, vous l’apprenez, tant qu’à faire, le jour de la Saintt Valentin.

Evidemment vous vous trouvez dans la foulée un mec gentil que vous traitez mal parce que dans votre tête ça débloque pas mal. Et donc vous le laissez tomber comme une vieille chaussette, ce qui n’est pas dans vos habitudes et crée le début d’une nouvelle boucle de « je suis trop conne, je ne vaux rien ».

Quelques mois plus tard, vous reprenez du poil de la bête et vous dites « fuck les cons, je vais faire ce que j’aime ». Vous voici pleine d’entrain, vos parents vous soutiennent comme toujours et vous avez une illumination « tiens, maquillage c’est bien ! ». Ni une, ni deux… vous foncez !

La rentrée inquiète, c’est pouffe-land à l’horizon, pas trop votre tasse de thé.

Mais vous avez encore de la chance, votre classe est la plus âgée, la plus mature, donc ça se passe bien. Même très bien.

Vous aviez décidé de faire une croix sur l’amour pour les deux années à venir histoire d’éviter les rechutes dans la connerie. Bon choix, vous économisez vachement sur la crème dépilatoire. La première année se termine bien , vous avez même réussi à partir à Londres comme vous le vouliez. Votre stage à la télé était intéressant, vous avez rencontré des célébrités, on dit que vous savez bien maquiller. L’ego est gonflé à bloc.

Deuxième année de maquillage… une classe sans vos copines. Une classe avec son lot de boulets. Ca pourrait aller si vous n’étiez pas l’une des plus âgée, la majorité ayant l’âge de votre petit frère mais avec les envies et les délires de jeunes de 16 ans.

Vous découvrez aussi que vos « amis » de longue date sont chiants. Oui, ça se plaint tout le temps. Et la conversation ne vole pas bien haut. Les soirées sont chiantissimes. Les gens bien ne viennent plus justement pour cette raison.

Les amis ont des métiers qui leurs prennent tout leur temps et parfois ont tellement changé qu’on se dit qu’on a plus rien à leur dire.

Il paraît que c’est ce qu’on appelle « entrer dans l’âge adulte ». Ouais, bah merci bien….

Vous collectionnez donc la lose.

Que ce soit les plans foireux, les soirées pourries, les gens qui vous prennent pour leur mouchoir quotidien mais ne retournent jamais la faveur quand il y a besoin.

Votre crispation est telle qu’on la remarque. Vous êtes à deux doigts d’insulter tout le monde, de hurler, de dégueuler toute la haine et la rage qui vous habite.

Vous n’avez pas souvent été dans cet état. Même jamais. Et c’est difficile à gérer.

Actuellement vous retournez hiberner sous votre couette le soir pour éviter de sortir et voir des gens qui vont forcément vous énerver.

Vous ne retournez pas les appels, vous faites la morte.

Et vous vous dites que la seule solution c’est de prendre son mal en patience, de gagner de la thune et de partir très loin d’ici.

Les petits posts amusants reviendront peut-être un jour. L’esprit léger est souvent là pour votre famille. Qui heureusement ne change pas et à même tendance à s’améliorer tous les jours. Le reste de l’humanité ne vous intéresse pas. Sauf ces gens incroyables qu’on découvre dans Rendez vous en Terre Inconnue. Parfois vous enviez leur ignorance et leur vie dure mais bien remplie de choses essentielles.

Vous avez besoin de spiritualité. Et vous vous demandez si croire enfin en quelque chose ne serait pas un réconfort.

En attendant, c’est le boulot qui vous fait tenir. Dans un sens, c’est déjà ça.

10 réflexions sur “Le crachoir ou l’origine de ma lose

  1. wow mon ptit clown t’as presque réussi à me déprimer. t’es chiante je peux même pas te faire une litanie de compliments pour te réconforter. je suis pas encore là, mais ça ne saurait durer, mais si c’était le cas je te paierais à boire, et on se marrerait comme la dernière fois. d’ailleurs je sors et je trinque en ton honneur.

  2. C’est fou ce que je me suis retrouvée dans cet article… un bien de voir qu’on est pas seule à péter les plombs, ne pas se reconnaitre… certainement « le passage à l’âge adulte » c’est vrai… espérons que ce ne soit qu’une mauvaise passe !

  3. Ouf ! Je ne suis pas le seul à me raccrocher à mon taf comme un naufragé aux débris de son navire.
    Je comprends ton attitude, Keira : je pense qu’il est nécessaire de passer par cette phase de loose absolue pour finir atteindre une certaine clairvoyance. Mais ne reste pas trop longtemps dans cette phase car l’inertie finit par tuer.

  4. ben je sais pas si tu maquilles bien mais t’ecris bien en tout cas…c’est donc pas la loose totale.allez, 2010 sera un grand millesime, c’est toujours bon a se dire…sur le fond, je n’ai pas grand chose a dire sauf que ceux qui n’essayent rien n’ont rien, au moins tu as tenté des trucs et des machins, et je ne pense pas que ce fût aussi sombre que tu en dresses l’inventaire, en tout cas sur le moment (a part le truc de la st valentin, pas cool a digerer certes…) mais ça pourrait être pire, au moins tu t’assumes c’est deja pas si mal …

  5.  » Et vous vous demandez si croire enfin en quelque chose ne serait pas un réconfort. »

    Et pourquoi ne pas croire en toi ? En ta capacité à aborder cette vie par le bon bout.

    Tu as fait des mauvais choix ? Oui mais tu en as appris.
    Tu as connu des déceptions ? Tu en connaîtra d’autres et ça t’aidera à faire le tri, à déterminer ce que tu veux, ne veux pas, et à te faire une place.

    23 ans, c’est encore jeune pour se poser dans une vie adulte et déjà trop vieux pour ignorer les aléas de la vie quand on a pas eu un parcours tracé.

    Qu’à cela ne tienne, quand on a la capacité d’écrire ce genre de choses, on a déjà un gros avantage sur beaucoup de gens pour analyser son parcours et en tirer les bonnes leçons.

    Donc si tu dois placer ta foi quelque part, je suggérerais en toi.

  6. Un merci spécial à F. Vivement les soirées alcoolisées !

    Boluda et jibé : le tout c’est de finalement se dire que ça va changer. Ca change toujours. Et ça me permet de répondre à philou… je ne suis pas non plus au fond du gouffre, je constate simplement la grande fatigue ou démoralisation qui s’empare de moi. Je lutte contre cela comme je l’ai toujours fait : en me protégeant. Maintenant, je sais que s’isoler tout le temps n’est pas non plus la meilleure des solutions.
    Et non, l’inventaire n’a pas toujours été sombre sur le moment… Il y a même eu de très beaux moments dans les zones d’ombre. C’est avec le recul que tu constates que ça vire au gris puis au noir. Et que finalement, même si tu t’amusais au moment où tu faisais des choix, ils se sont avérés être très mauvais pour toi. Et c’est parfois dur de savoir faire la part des choses.

    Je ne suis pas au fond du gouffre. J’ai juste une grande tendance masochiste qui consiste à faire régulièrement des bilans de ma vie. Et je suis très auto-critique. Ce qui n’aide pas. 😉

  7. Keira, merci de ces lignes pleines de toi. J’ai eu un sourire complice de temps à autre, ce qui va certainement contribuer à l’amélioration esthétique de ta gambette !

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