On arrête de toucher à mes madeleines

Le temps passe et voilà, j’ai déjà 28 ans, je dis des phrases du genre « tu vois, ça fait 14 ans que je mets des tampons, j’ai jamais eu des problèmes », des « ça fait 10 ans que j’ai le bac »… Je grandis et maintenant, je parle parfois en dizaine d’années. Cette année, par exemple, j’ai rempli pour la première fois ma déclaration d’impôts et ça m’a un peu déprimée : cette fois, c’est officiel, je suis grande.


Du coup, je suis très attachée à certains souvenirs, certains endroits, certains détails. Proust avait ses madeleines, moi, j’ai plein de choses. Mais parfois, on se rend compte que la madeleine a un peu moisi et ça me fait un pincement au cœur. Cette année, pour mes vacances, je suis partie avec mes parents dans l’appart familial en bord de mer, celui où j’ai passé toute mon enfance et mes vacances avec Guillaume 1er. En gros, ça faisait 4 ans que je n’y avais pas mis les pieds pour des séjours de plus de 3 heures. Et là, j’ai été déçue, en fait. Pas par les vacances en elles-mêmes mais par le lieu. Avec mes yeux d’adultes, j’ai vu à quel point la station était laide et délabrée, les fissures au sol, le cheap qui m’agresse de toute part. Sans parler du bruit le soir. On habite au dessus d’une place avec bars et resto et le vendredi soir, on a eu droit à deux karaokés. Avec ma mère, on n’en pouvait tellement plus
qu’on a embarqué mon père pour une marche nocturne. Finalement, on s’est posés sur la plage un peu plus loin, au calme. Ca au moins, ça ne change pas.

Autre détail. En juin, je suis allée rendre visite chez ma tante chez qui j’ai passé de longues heures à jouer pendant mon enfance. Là, j’ai soudain remarqué qu’elle avait coupé les branches basses de ses chênes, celles qui nous servait à grimper dedans. Je me souviens comme on pouvait s’éclater dans ses arbres. Et là, mes parents émettent l’idée de vendre leur maison dans quelques années (on parle en dizaine, quand même) pour quelque chose de plus petit et là, j’ai protesté : « ah non, hein ! Vous avez déjà vendu l’appart de mon enfance, vous gardez la maison ! ». Il faut savoir qu’on a beau avoir vendu l’appart de mon enfance depuis 15 ans, j’en rêve encore souvent. Même que quand Vicky est venue chez mes parents en octobre, je l’avais amenée en pèlerinage devant mon ancien immeuble. Première fois que je conduisais dans ce parking où j’ai passé des milliers d’heures (je jouais au
tennis contre un mur, souvent, là) et ça m’a paru petit, finalement, un peu différent. Moisie la madeleine.

En fait, il y a des jours où la vie adulte m’ennuie. Evidemment, c’est plein de défis, tout ça, mais c’est vrai que c’est un peu angoissant. Je me souviens, en terminale, j’avais décidé un matin de ne pas avoir le bac car avoir le bac signifiait partir vivre seule et ce que ça impliquait me filait une trouille monstre. A l’arrivée, ça fait maintenant 10 ans que je vis seule, 3 que je ne rentre plus tous les week-ends chez mes parents. Je remplis même des papiers administratifs, je gère mon argent… Bref, je suis une grande fille. Sauf que je suis encore loin d’avoir tout fait. Parce que là, j’ai toute ma carrière à construire, je suis encore au bas de l’escalier que je veux gravir. Et ma vie privée, c’est pire que tout. Vivre à deux, je l’ai déjà fait, même si c’était officieux mais un jour, je me reproduirai sans doute et là, ce sera le grand saut dans le vide. Comment on fait pour être parent ? Comment je peux être responsable d’un petit être ? Ok, j’ai un chat, je suis techniquement responsable d’un petit être mais ça n’a strictement rien à voir. Un enfant, il faut tout lui inculquer, des valeurs, des
principes, des connaissances… Il faut lui donner tout ce qu’on peut pour qu’il parte bien dans la vie. Sans parler de l’inquiétude quand on a un gosse. Telle que je me connais, j’ai toutes les cartes en main pour être du type mère abusive qui colle trop ses gosses… Bon, ma mère est très anxieuse aussi et on n’a pas trop été étouffés quand même. Ceci dit, j’ai passé la semaine à travailler sur le forum parental de Ioulia qui est en vacances et être parent, ça me paraît hyper stressant. « Mon enfant ne marche pas encore », « mon fils n’arrive pas à marcher », « il ne parle pas, est-ce normal ? ». Déjà que j’angoisse rien qu’à lire ça… Heureusement que Ioulia ne part que 15 jours, j’aurais fait une grossesse nerveuse à force.

Alors face à l’énorme Inconnu avec majuscule qui se dresse devant moi, les souvenirs d’enfance sont un peu mes bulles de réconfort. Alors maintenant, on va arrêter de toucher avec mes madeleines ou je vais me fâcher tout rouge !

18 réflexions sur “On arrête de toucher à mes madeleines

  1. Merci Nina ! Chez les 20’s on en est tous plus ou moins là. Début de vie active, inquietude sur l’avenir, questions… Purée, moi aussi ça fait 10 ans que j’ai eu le bac… Ca calme. Ca fait passer de l’autre coté. Chez les gens sages. Ou pas…

  2. Nina, tu deviendrais pas un peu vieux par hasard à ton age ? La seule chose constante est le changement de toute façon…

    Moi, j’étais content d’avoir mon bac! Enfin, je pouvais choisir ce que j’allais faire, explorer le monde comme un grand (ce que j’ai fait d’ailleurs contre l’avis des mes parents).

    Concernant les enfants, il y a tellement d’autre gens qui ont reussi à élever leurs enfants alors tu vas bien y arriver auusi, je suis sur!

    Et pour incertitude, que dirais tu si dans un future lointain à 40, 45 ans tu perdras ton emploi avec des chances d’en retrouver quasiment null car consideré trop vieux ?

    Alors, un peu plus de courage!

  3. Je pense que le précédent com n’a pas tort : nostalgie de l’enfance c’est un peu nostalgie de la vie, où tout passe très vite et où on ne prend conscience de son bonheur qu’au bruit qu’il fait en partant (Romain Gary).
    Mais une bonne phrase pour ne pas se rigidifier dans l’éducation de ses enfants : toujours se dire que « quoi que vous fassiez, ce sera raté ».

  4. Rhaa oui, la nostalgite aigue. Je connais. J’ai beau me dire « nononon, regarde devant toi », j’ai toujours le coeur qui gonfle quand je rêve (trèèès souvent aussi) à ma maison de vacances d’enfance, à mes playmobils, à mes jeux d’enfants, aux bons souvenirs familiaux… De temps en temps, on aimerait bien y retourner, pour voir, un peu, se soulager un peu du poids parfois un peu lourd des adulteries.

  5. Et maintenant elle parle de Proust… Nina, tu serais pas en train de me draguer par hasard depuis quelques temps ? 😛
    Bon en tout cas moi je rappelle que j’ai mon bac que depuis 3 ans et que je me sens jeeeuuune 🙂 (non c’est même pas vrai, dans ma tête je suis presque andropausé c’est vous dire…)
    Pour ce qui est de la nostalgie… c’est comme la peur de l’avenir, c’est malsain quoi, ça fait qu’on vit pas dans le présent (Bobby où l’art de nucléariser les portes déjà ouvertes). Or le plus chouette dans la vie, c’est le présent, non ? (tiens, ça ferait une bonne question ça : qu’est-ce qui compte le plus encore les souvenirs, le moment présent, et les souhaits ?)

  6. Nina, ne te fache pas tout rouge. Peut-être ai je interprété différement « l’énorme Inconnu » mais mon enfance n’était pas très heureuse. Pas que j’étais battu mais mes parents n’auraient jamais du se marier. Et ça a gaché presque tous le temps l’anbiance…

    Puis, je me suis chopé un tumeur du cerveau il y a 4 ans. Avant l’opération on m’a donné encore un an. Maintenant ça fait 4 ans et je suis encore capable de marcher, faire la voile et même écrire des comm plus ou moins intéligents ici. Bcp des gens ne comprennt pas les problèmes qu’un truc pareille vous cause. J’en parle ouvertement ça car de choper un truc pareille n’est la faute de personne mais pas de chance…

    Alors, soyez nostalgique ou pas mais profitez surtout de votre vie, prenez des risques mésurés et ne vos laissez pas vous endormir par le métro, boulot, dodo comme bcp en région parisienne!

  7. Nina,

    tu ne me connais pas sinon tu saurais que je suis bien capable de dire des phrases

    …un peu vieux par hasard…

    …ne te fache pas…

    un peu moqeur et il ne faut pas toujours prendre ça trop au serieux!

    J’ai écrit ce concernant le future et les tracas de la qu’on peut avoir parce que tu as parlé de « l’énorme Inconnu avec majuscule qui se dresse devant moi ». Ou tu pensais à un mec encore inconnu en particulier et j’ai mal compris ?

    Je sais très bien qu’on voit les choses autrement avec les yeux d’enfant que avec les yeux d’un adulte… Si tu pense à ces stations balnéaires près de la Grande Motte par exemple, je trouve qu’on a masacré la cote à ces endroits là. Mais je n’ai jamais vu ces endroits avec les yeux d’un enfant… Je suis aussi repassé aux endroits ou j’ai été en vancances quand j’était petit. Avec mes yeux d’adulte ça me semble pas particulièrement laid mais un peu quelquonque…

  8. Juste une précision : je ne me sens pas agressé (pour rien) ni avais je te prie comme une personne agressive. Et la région de la Frande Motte a été mentionné juste comme exemple.

    Moi, je suis et reste calme et j’arrete là car il se sert à rien de se disputer pour un petit malentendu au départ.

  9. Nina,

    Juste pour clarifier : Je ne suis pas fache contre toi, mais souvent avec les accents car la Français n’est pas ma langue maternelle…

    J’ai copié ton expression « fâcher tout rouge » de ton texte dans une comm puis j’ai expliqué dans une autre que quand j’écris ça c’est parfois un peu moqueur ou pour rire et que ce n’pas tourjous à prendre trop au serieux! C’est tout, je n’ai jamais voulu dire que j’était vraiment faché contre toi! Tes acticles sont très souvent très bon à mon avis!

    Pour des malentendus, il peut toujours en avoir mais pour moi c’est règlé. Ne le repte plus une quatrième fois et passons à d’autre comms plus utiles/interessantes!

    Kai

  10. Nina,

    je suis d’accord, STOP et ça sera la dernière comm à ce sujet! Je ne t’ai jamais cconsideré omme une personne agressive mais après ce dialogue, je commence presque à avoir un peu des doutes…

    Passons maintenant calmement à d’autres dicussions!!!

  11. Nina,

    normalement, je ne voulais plus rien écrire sur ce sujet. Si tu n’aurais pas écrit toi même ce qui suit, je n’aurais jamais écrit la dernière « pique »… J’ai déjà écrit plusieurs fois dans ta comm sans que ça dégenére comme ça sans veritable raison. On n’était pourtant pas toujours d’accord…

    Bon, maintenant c’est vraiment fini pour cette comm!

    Du calme des deux cotés et pensons à d’autres comms!

    Je cite :

    …un peu gonflant d’être toujours être prise comme une personne agressive alors que je réponds CALMEMENT. Franchement, c’est hallucinant, je suis une personne en général très appréciée mais ici, j’ai l’impression que je ne peux rien dire sans que vous vous sentiez agressé pour rien…

  12. En résumé, si t’es pas au chômage, atteinte d’une grave maladie ou en rupture amoureuse grave, tu n’as juste pas le droit de te plaindre. Pour une fois que tu fais dans l’émotif, tes lecteurs te ferment la porte à la figure, ils sont sympas quand même…

  13. Nina,

    Je ne voulais plus écrire ici. Je sais bien que mon nom/pseudo n’est pas protégé mais la comm

    KHK le: 07/08/2008 01:44:23

    n’est pas de moi et ça serais le cas aussi pour d’éventuels comms sur ce article car j’arrete là! A l’heure du dernier comm avec mon pseudo, je dormais tranquillement dans mon lit avant l’arrivée des orages. Ceci juste pour clarifier les choses…

    J’avais bien compris que le sujet principal de l’article était tes souvenirs d’enfance. Je n’aurais jamais pensé au départ que ma comm avec la remarque sur l’Inconnu avec un grand I à la fin de ce article prendrait tellement d’importance…

  14. Bonjour, Je suis tombé par hasard sur ton site.
    Ce post est très beau.

    J’ai 28 ans tout pareil, et un élastique qui me tire dans le dos et m’appelle à l’enfance. Je voudrais retrouver ma vision d’enfance surtout, son innocence et son aspiration à l’avenir.

    Mes parents ont vendu notre maison de vacances il y 7 ans. Une maison en Vendée à 50m de la plage. On y a passé toutes nos grandes vacances de notre enfance et de notre adolescence. C’est une batisse magnifique perdue dans les pins, pleine à craquer de souvenirs merveilleux. C’était une maison toujours pleine de vie, des jeunes des vieux, des ballades en vélo, les sardines grillées au barbaque de mon oncle, les pêches à la crevette et les châteaux de sable, les premiers flirts, les premières cuites au vin blanc sur la plage …
    Ça a été un déchirement pour moi et pour mes soeurs. Un vrai paradis perdu. Il m’arrive d’en rêver la nuit et de me réveiller en pleurant …

    On devrait effacer nos mémoires à 20 ans. C’est vraiment trop douloureux parfois.

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