La coquette et l’intello

Depuis quelques temps, je le confesse, je délaisse toute presse féminine. Lassitude, impression d’avoir déjà tout lu, j’en parlerai une autre fois. Or un petit nouveau qui se positionne différent apparaît dans nos magasins. Vais-je craquer ? Non car en lisant ceci et ceci, j’ai compris que ce nouveau venu, Causette de son nom, n’arrivait toujours pas à dépasser le sempiternel clivage de
la presse féminine. Soit t’es coquette et conne, soit t’es intello et négligée. Raaaaah !

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Petit point de sémantique avant de poursuivre : je parlerai ici de femmes intellectuelles et non pas intelligentes. Parce qu’on peut très bien être cultivée et avoir le QI d’une huitre (ce qui n’empêche pas une bonne mémoire) et avoir une culture proche du néant et être néanmoins intelligente. Maintenant que ce point est posé, poursuivons. Donc la femme, cet être à part, est souvent présentée comme polyvalente, capable de parler au téléphone tout en gribouillant la liste des courses et surveillant la cuisson du poulet. Par exemple. Ce qui n’est pas mon cas vu que je ne fais jamais de liste de courses ni ne cuis de poulet. Par contre, j’ai toujours un franc succès quand je sors ma botte secrète : être capable de taper sur mon clavier une phrase cohérente tout en discutant avec la personne à côté donc en ne regardant ni clavier ni écran. J’ai fait ça l’autre jour à ma stagiaire qui était persuadée que je tapais n’importe quoi. Même pas, et toc. Par contre, je le fais de façon totalement inconsciente. Mais je m’égare ! Donc la femme a beau être polyvalente, il semble qu’on ne soit capable que de ne s’adresser qu’à une partie de son cerveau : soit la partie coquette, soit la partie intellectuelle. Les deux ? Et bah non !

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Vous allez me dire (à juste titre) que j’exagère, qu’il y a aussi des reportages sérieux dans Elle et Biba, par exemple. Si, c’est vrai. Des reportages souvent consacrés aux conditions de vie des femmes dans des pays où ce n’est pas la joie, j’ai même lu un article sur l’excision dans Biba et ça ne te met pas super en joie. Mais bon, il est vrai que ce genre d’articles est un peu noyé dans la masse des mascaras, rouges à lèvres, it bag et photo de mannequins à l’IMC relativement préoccupant. Et encore, les mannequins des photos sont bien plus épaisses que les mannequins des défilés. A ce sujet, je me demande bien pourquoi les créateurs ne font pas défiler directement leurs tenues sur des cintres… Passons. De l’autre côté, on nous propose donc un magazine sans mode et beauté parce que les filles en talon sont des pétasses. Ouiiiiiiiii…

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Alors il est vrai qu’en général, quand je lis un Cosmo ou assimilé, c’est pas forcément pour me cultiver mais plutôt pour me détendre et avaler plus facilement les 5 ou 6h de train qui me séparent de chez mes parents. J’ai bien tenté les mots croisés mais dans un élan de modestie, j’avais acheté un jeu niveau 1 ou 2 avec comme réponse à la définition « pour jouer », il fallait inscrire le mot « jouet ». Ceci étant, j’ai cherché quelques minutes, tellement je pensais pas que ça pouvait être aussi simpliste. Ah ben si… Au secours. Si je veux me cultiver, j’irai plus prendre un Nouvel Obs, un Courrier International ou que sais-je encore. Choisis ton camp camarade. Mais ce qui m’énerve, c’est cette perpétuelle dichotomie. Doit-on, pour être intellectuelle, se foutre de la mode, avoir du poil aux pattes et une sacrée gaine de capitons autour des cuisses ? Franchement, que cette dichotomie vienne de la part de femmes, ça me rend dingue. Parce que pardon mais quand on dit que pour avoir un esprit sain, faut un corps sain, je trouve ça on ne peut plus vrai. Et puis tiens, tirons un peu la démonstration. La mode, le maquillage, ce n’est ni plus ni moins que de la science. Pardon ? Mais oui, nous avons un corps et sur ce corps, il faut placer des oripeaux qui correspondent au mieux à sa géométrie. Par exemple sur une fille petite comme moi, faut pas trop abuser des tailles basses qui peut donner une sensation de « « petites pattes » . De la même
façon, la coiffure ou le maquillage doit épouser la forme de notre visage et respecter ses couleurs. Du fait de mes yeux bleus et de ma peau claire, je dois plutôt jouer sur les couleurs froides.
Mets-moi du rouge à lèvres rouge et tu verras à quel point ça ne me va pas du tout. Et, oui, j’aime avoir la peau douce et sentir bon, reconnaître les effluves qui me parlent et se marient bien à
la chimie de ma peau, trouver des produits qui la rendent soyeuse parce qu’une peau bien hydratée ne tire pas. Quant au régime alimentaire et au sport, là, encore, c’est une question de physique.
Si je mange mal, je digère mal et je ne suis pas bien. En tant qu’adepte de la chrononutrition (enfin, je dis ça mais je petit déjeune pas, c’est mal), je sais que le midi, j’ai intérêt à privilégier les sucres lents sinon à 17h, fringale et perte d’énergie. Or ma journée de travail dure jusqu’à 19h, je peux pas perdre 2h à ne rien foutre.  2h sur une journée qui en dure 8, c’est énorme. Et je ne te parle même pas des régimes équilibrés à base de calcul de calories… Quant au sport, il permet de se vider la tête des conneries, se purger pour booster sa créativité. Sans parler de la magie des endorphines qui me donne de l’énergie à revendre. Etant d’un naturel stressé, je peux vous garantir qu’on n’a rien trouvé de mieux que le sport pour se détendre. J’ai même une théorie qui dit que tout problème est dissolvable dans l’eau chlorée. Testé et approuvé par moi.

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Bref, je suis navrée de constater qu’en 2010, il faille encore choisir son camp. Non mais quelqu’un peut-il m’expliquer depuis quand mettre des talons empêche de se cultiver. Oui, ok, c’est moins pratique pour marcher dans les musées, par exemple, mais n’importe quelle femme habituée à ses talons de 12 pourra vous faire toute une expo sans penser à ses pieds, concentrée sur les œuvres qui sont étalées sous son nez. Et quand on fait un régime, ce n’est pas les neurones que l’on perd, ce sont les capitons. Alors amies, unissons nos forces et crions ce slogan : « Moi, je suis intello même avec mes stilettos ». Non mais…

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Faudra que je pense à acheter des stilettos pour le coup.

11 réflexions sur “La coquette et l’intello

  1. Oui, on peut faire attention à soi et se cultiver. Mais l’on peut aussi faire attention à soi et ne voir aucun intérêt dans les articles girly, non ? En ce qui me concerne, j’aime me fringuer, prendre soin de moi mais je ne prends aucun plaisir ni n’ai aucune curiosité pour les articles consacrés au sujet, encore moins aux magazines dits féminins. En cela, Causette est pour moi une bonne nouvelle : enfin un féminin qui ne s’adresse pas qu’à nos cheveux et à nos ongles !

  2. Comme je te rejoins, perso, je suis une vraie pintade (j’adoooore le maquillage, les fringues et surtout les chaussures) mais ça ne m’empêche pas d’être intelligente (sans fausse modestie) et de suivre des études supérieures !

    Après cette dichotomie dont tu parles, je la gère en prenant ici ou là les choses qui m’intéressent. Finalement, je ne demande pas au Elle la même chose qu’au Nouvel Obs, et je lis les 2.

  3. « être capable de taper sur mon clavier une phrase cohérente tout en discutant ». Je te croirais si, dans le premier paragraphe tu avais écrit « différemment » au lieu de « différent ». Non mais ! 🙂

  4. hum, traiter Causette d’intellectuel, c’est peut être aller un peu fort. J’en ai lu un, et le type de sujet c’est par exemple la corrélation entre cheveux blonds et opinion politique de droite, genre on a remarqué que MAM et MLePen sont blondes alors que Maubry et Royal sont brunes. Youplaboum, quoi. Ma culture s’en est retrouvée bouleversée.
    Le ton assez chienne de garde diffère effectivement d’un féminin classique. Mais sinon le problème vient toujours qu’on ne cible que les femmes en étant persuadé qu’il faut leur parler comme à des neuneus.

  5. Le problème ne résiderait-il pas dans la question de l’offre et de la demande? Cosmo, biba et grazia sont cosmo, biba et grazia parce que c’est ça qui se vend… (lapsus rigolo, j’avais écrit au début « vent » et pas « vend »…)

  6. Même si cette dichotomie est encore bien présente dans les magasines, j’ai l’impression que c’est moins le cas « dans la vie ». Du moins, les filles/femmes ne se posent pas la question de savoir si elles seront roots-intello ou Pin-up-décérébrée. Malheureusement, on trouve parfois des filles qui oui, s’inscrivent bien dans ces cases (mais la faute à qui?). N’empêche que tu as bien raison, c’est vachement compliqué d’être jolie et coquette, on n’a pas idée en fait!
    Et aussi je m’insurge contre l’augmentation de publicité dans tous ces magasines qui en étaient déjà bien remplis!
    (j’enfince des portes ouvertes là, non?

  7. Ca me parle aussi quelque part, cet article, c’est un peu ce sentiment de vertige dès lors qu’on essaie de trouver un journaliste sportif qui dit un truc interessant. Ah oui, mais si t’aimes le foot en france, c’est que t’es beauf forcément.
    Bref c’est rassurant: on a des profils qui ne collent pas aux études de toutes sortes qui servent à cibler un lectorat type.

  8. Très bon article!
    En ce qui concerne l’intérêt pour le foot (@Matt), il est très répandu dans certains milieux intello, non? C’est même carrément « de bon ton » d’afficher son petit côté « popu » via le ballon rond, je trouve, parfois… Et « l’Equipe » est un journal de CSP++!

  9. daring: justement c’est cette assimilation « foot + popu = niveau d’analyse proche du gazon » auquel l’article me faisait penser.
    Et comme tu dis, si on est « intello » et qu’on affiche son coté footeux, c’est forcément un calcul d’image (pas nécessairement, hein mais dans la perception qu’on en a)
    Enfin on s’éloigne du sujet, mesdames, excusez-nos digressions de bourrins 🙂

  10. Oui, excusez les digressions! Cela dit,Matt, je suis une fille, qui se retrouve assez dans ce post, et qui ne porte pas le foot dans son coeur. Et vu que je suis une fille, personne ne viendra me le reprocher, hein? ;p

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