Les merveilleux ressorts de la drague féminine

Par DianeVingtenairets, vingtenairettes, Nina, collègues, lecteurs chéris mon amour
Aujourd’hui un petit article option cosmo/biba. Il se trouve que j’ai eu la récente occasion d’observer le très intéressant -voire un tantinet comique- phénomène de ce qu’on pourrait nommer la « drague féminine », et que dans un élan d’altruisme compulsif  j’ai eu envie de partager avec vous ce beau moment de démonstration plus ou moins subtile des conséquences plus ou moins subtiles elles aussi de l’action des hormones sur le corps et l’esprit féminins.

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Plantons le décor. Etant apprentie prof, quand je ne donne pas de cours j’en prends, avec plusieurs autres profs débutants, de plusieurs matières différentes. Bref, Lundi dernier je rentre donc en RER avec trois collègues, dont une de ma matière (appelons la Pamela), et deux autres (masculins, je précise) profs d’histoire géo (Brandon et Stephen). Et lors de ce long trajet j’ai pu observer non sans intérêt donc que ma collègue ne semblait pas indifférente aux charmes d’un de nos compatriotes mâles (Brandon).


ANALYSE COMPORTEMENTALE DE LA FEMELLE EN RUT

1/ Première technique: éloigner toute concurrence
Etant donné que j’étais danger potentiel en tant qu’autre femelle présente, fraichement brushée de la veille, et en plus connaissant la cible depuis un peu plus longtemps qu’elle, il a fallu m’évincer afin de retenir l’attention un maximum. Ce pourquoi Pamela a  choisi comme sujet de conversation une formation à laquelle ils ont assistés tous les trois, mais pas moi. Elle peut ainsi empêcher ma
participation à la conversation un maximum, et vous pouvez ainsi comprendre le pourquoi de cet article. N’ayant strictement rien à foutre et ne comprenant rien à ce qu’ils disaient, la politesse m’interdisant de sortir mon IPOD, il ne me restait plus comme option pour éviter l’ennui mortel que l’observation sociologique.

2/Deuxième technique: créer un lien social et relationnel avec la cible
Pour cela, plusieurs possibilités: on peut la flatter, s’affirmer passionnée par sa collection de capsules de bière ou rire un peu exagérément au moindre trait d’humour de sa part. Pamela a pour sa part opté pour la fameuse technique du « tissage du lien social par dénigrement d’un tiers ». Je m’explique. Une fois choisi le sujet de conversation qui me mit hors-jeu, elle fit alors preuve d’une déjection de fiel impressionnante à propos des autres gens présents à leur formation du matin. Il s’agit donc de se rapprocher de quelqu’un en s’alliant contre un « ennemi commun », une sorte de bouc émissaire contre lequel on n’a rien en particulier mais qui est bien utile pour se rapprocher de Brandon. Et il ne s’agit même pas de critiquer ses techniques pédagogiques, ou ses qualités humaines, nononon: elle ne s’attaquait à rien de moins que… leurs physiques. Ayant choisi pour cibles uniquement des filles (cf technique n°1), elle menait un listing de leurs défauts physiques, voyageant entre le visage ingrat de l’une et les kilos superflus de l’autre…le tout sous couvert d’une observation purement socio-pédagogique: ça doit être dur le regard des élèves sur soi quand on est moche comme ça… un vrai délice. Et ce qui lui a permis de passer à la troisième technique:

3/Troisième technique: le chleuasme
aaahhh ça, c’est une des techniques préférées des filles. Ce mot barbare et pas très beau (chleuasme) désigne une petite chose toute simple. En gros, après avoir déblatéré sur la mocheté ambiante des filles présentes à la formation ce matin là, elle opte pour un « enfin moi, je me considère pas magnifique non plus, mais bon, dans la norme quoi »…  Et qu’essaye t-elle de faire ici? La même chose que toutes celles qui disent en soupirant « j’suis trop moche », « j’suis trop grosse », « j’suis trop conne »…… c’est à dire d’essayer de faire dire à celui qui est en face de soi que « mais nonnn, t’es pas mooooche ». Le chleuasme consiste donc en un auto-dénigrement (que l’on ne pense pas pour un sou, bien sûr) pour faire dire le contraire à l’autre. Elle attendait là un « attends, t’es vachement mieux qu’elles quand même, un bijou rare des îles malouines, allons coïter dans mon appartement ».

4/quatrième technique: bien se faire voir
Juste après le dénigrement des autres puis de soi-même, Pamela eut un petit temps de pause (pas trop long, quelqu’un pourrait prendre la parole et détourner l’attention de Brandon) puis lança un très spontané « enfin, j’suis pas méchante hein… » qui personnellement m’a bien fait intérieurement glousser. On imagine le petit dialogue intérieur avec elle-même pendant cette pause « merde je viens de passer 10 min à cracher sur le physique d’autres filles je vais passer pour une méchante aigrie faut pas qu’il croit ça sinon exit le coït faut que je dise quelque chose qui fasse sympa pour le détromper vite vite vite….. » et pouf. Et pour compléter le tableau, après avoir passé 14 stations de RER (c’est long, j’vous le dis) à parler d’un truc que je ne comprenais absolument pas, elle se retourne vers moi entre la 14ème 1/2 et la 15ème et dernière station pour commencer un: « au fait, on parle de la formation qu’on a eu ce matin et…..ah tiens, on descend ici. Tu restes bien toi, hein? bon bah salut! »

Je me passerais de davantage de commentaires (pour une fois), et en guise de conclusion ne résiste pas à vous mettre un passage de Nana (experte en chef en ce qui concerne la séduction féminine dans toute sa cruauté et son ingénuité.. ) (Nana est une fille des rues, elle débute en tant qu’actrice dans un théâtre de boulevard et fait bcp d’effet aux hommes, et même  qu’un prince vient la rencontrer dans les coulisses)

« Si Son Altesse veut bien entrer… 
Un cri de femme surprise se fit entendre, et l’on vit Nana, nue jusqu’à la ceinture, qui se sauvait derrière un rideau, tandis que son habilleuse, en train de l’essuyer, demeurait avec la serviette en l’air. 
— Oh! c’est bête d’entrer comme ça! criait Nana cachée. N’entrez pas, vous voyez bien qu’on ne peut pas entrer! 
Bordenave parut mécontent de cette fuite. 
— Restez donc, ma chère, ça ne fait rien, dit-il. C’est Son Altesse. Allons, ne soyez pas enfant. 
Et, comme elle refusait de paraître, secouée encore, riant déjà pourtant, il ajouta d’une voix bourrue et paternelle: 
— Mon Dieu! ces messieurs savent bien comment une femme est faite. Ils ne vous mangeront pas. 
— Mais ce n’est pas sûr, dit finement le prince. 
Tout le monde se mit à rire, d’une façon exagérée, pour faire sa cour. Un mot exquis, tout à fait parisien, comme le remarqua Bordenave. Nana ne répondait plus, le rideau remuait, elle se décidait sans doute. Alors, le comte Muffat, le sang aux joues, examina la loge.  Ce sentiment de vertige qu’il avait éprouvé à sa première visite chez Nana, boulevard Haussmann, l’envahissait de nouveau. 
— Dépêche-toi donc ! souffla Bordenave, en passant la tête derrière le rideau.
Je vous demande pardon, messieurs, dit Nana en écartant le rideau, mais j’ai été surprise…
Tous se tournèrent. Elle ne s’était pas couverte du tout, elle venait simplement de boutonner un petit corsage de percale, qui lui cachait à demi la gorge. Lorsque ces messieurs l’avaient mise en fuite, elle se déshabillait à peine, ôtant vivement son costume de Poissarde. Par-derrière, son pantalon laissait passer encore un bout de sa chemise. Et les bras nus, les épaules nues, la pointe des seins à l’air, dans son adorable jeunesse de blonde grasse, elle tenait toujours le rideau d’une main, comme pour le tirer de nouveau, au moindre effarouchement.
— Oui, j’ai été surprise, jamais je n’oserai… balbutiait-elle, en jouant la confusion, avec des tons roses sur le cou et des sourires embarrassés.
— Allez donc, puisqu’on vous trouve très bien ! cria Bordenave.
Elle risqua encore des mines hésitantes d’ingénue, se remuant comme chatouillée, répétant :
— Son Altesse me fait trop d’honneur… Je prie Son Altesse de m’excuser, si je la reçois ainsi…
— C’est moi qui suis importun, dit le prince ; mais je n’ai pu, madame, résister au désir de vous complimenter…
Alors, tranquillement, pour aller à la toilette, elle passa en pantalon au milieu de ces messieurs, qui s’écartèrent. »

10 réflexions sur “Les merveilleux ressorts de la drague féminine

  1. j’adore !
    c’est vrai que ces techniques sont efficaces! je ne sais pas laquelle j’ai préféré( je ne suis plus sur le marché depuis un moment), mais je vois qu’en matière de drague, tous les coups ou presque, sont permis…

    Sandra F

  2. C’est vrai que c’est souvent très drôle ces parades amoureuses, surtout lorsque l’on ne maîtrise pas tout à fait cet art 🙂
    J’ai beaucoup apprécié le passage de Nana.

  3. Un bien beau réquisitoire que me rappelle la célèbre formule : « je ne veux pas dire de mal, mais effectivement, elle est gentille ».

    Comme il devait être amusant de voir la nana (coquine ingénue ou catin manipulatrice dans le roman d’ailleurs ?) s’employer quand on sait que soit Pamela plait à Brandon et deux battements de cils suffisent, où il ne la trouve pas à son goût et en dehors d’un état alcoolique avancé, elle n’a aucune chance.

    Je ne saurais en revanche, que déconseiller fortement la partie de 3) de la technique, déjà trop prisée par les ados en manque d’estime personelle pour avoir un quelconque côté vendeur.

    A quand l’article, « comment je m’y prend pour décocher mes flèches » 🙂

  4. Oups, j’avais oublié le « par Diane », rendons à César ce qu’il lui appartient. Cet article m’a fait mourir de rire, je voulais justement parler de la séduction au féminin et de sa lourdeur, tu m’as devancée !

  5. Ah la la, bravo, j’ai adoré!
    Ouf! J’ai pas la même technique, moi c’est plus à base de gloussements ridicules qui m’énervent prodigieusement d’ailleurs (mais ça a donné des résultats) et de sourires d’imbécile heureuse à en avoir mal aux joues littéralement 😉

    Le rapprochement avec Nana, grandiose!

  6. La nonne nimousse, tu as oublié l’option 3: parfois l’homme n’a pas vraiment besoin que la fille lui plaise pour céder… tout dépend de son potentiel charmatoire. Si c’est plutôt fernandel que brad pitt, en général il va pas forcément faire le difficile… (mon dieu ce que je dis est horrible, mais article option biba oblige)
    Et pour répondre à ta question, c’est ça qui est formidable avec ce bouquin, c’est qu’on ne peut jamais vraiment « classer » Nana dans une catégorie ou dans l’autre: on oscille en permanence entre le dégout (=c’est une ignoble pourceaude cruelle et manipulatrice) et la pitié (finalement c’est eux qui lui courrent après tout le temps, et elle a un ptit côté ingénu qui est désarmant).
    Bref lisez ce livre, il est sublime.
    Et Presso, Nana utilise aussi beaucoup le gloussement, le gloussement est une technique efficace agrée par le ministère des mâles dominants. Ce pourquoi les filles se font très souvent plus gourdes qu’elles ne le sont en présence masculine= ça plait aux hommes.

  7. c’est trop bon 🙂
    D’autres techniques, viiiiiite 🙂

    (celle qui réconforte le gars trompé par exemple, celle qui démontre que la nana actuelle du mec est chiante quand même un peu, si… )

  8. [Mode XIXème siècle]

    Madame, si votre propos tend à nous rappeler que les bas instincts de l’homme le pousse parfois à envisager la relation charnelle sous un angle peu flatteur, en particulier sous l’emprise de substances éthyliques; voire qu’il puisse envisager d’avoir recours aux services de certaines filles moyennant espèces sonnantes et trébuchantes, je ne saurai qu’en convenir.

    Je pensais toutefois que vous nous décriviez un processus de séduction dont le but non avoué était d’engager une relation entre les deux êtres, auquel cas je maintiens mon idée, si vous ne lui plaisez pas, vous pourrez toujours vous employer, il ne vous envisagera pas sous l’angle souhaité.

    Mais rassurez vous, plaire n’est pas qu’une question d’attributs physiques, même si au moment de consommer l’union, il faut un minimum d’effet mécanique pour que la nature entre en action.

    Et dans le cas de votre consœur, que je subodore professeur de lettres, je n’ai pas envisagé qu’elle puisse adopter ce comportement dans le seul but de satisfaire à de simples pulsions, mais je peux faire erreur.

    Quand à ce monsieur Zola, dont la quête de vérité fit écrire : « Et je désire que mes livres, si cruels qu’ils vous paraissent, vous donnent tout au moins l’amour de la vérité et un peu de science de la vie. » ,je ne doute pas qu’il y soit parvenu, ma préférence allant à La Terre dans son oeuvre gargantuesque. Toutefois, je ne saurais souscrire complètement à sa vision de la vérité, chacun de nous étant un prisme, par définition déformant dans ce que sa perception a d’auto-centré.

    [/Mode XIXème siècle]

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