Discrimination, en lettres de sang

Il y a des fois, en lisant les news, je me demande où je vis. Sommes-nous bien en France, en 2009 ? En guise de cadeau de nouvelle année, la sémillante Roselyne Bachelot nous a gâté : non, les gays n’ont toujours pas le droit de donner leur sang. Heu… Au secours ?


Parfois, j’ai la sensation que nous sommes en pleine régression sociale. Pour donner son sang, il faut remplir des conditions drastiques au delà du raisonnable, parfois. Evidemment qu’il faut être prudents mais à partir du moment que les gens ont un comportement responsable, leur sang est aussi bon que n’importe qui. En tant qu’hétéro, je ne peux déjà pas donner mon sang car j’ai eu plus de deux partenaires sexuels ces 6 derniers mois. Même si j’ai mis des petits capuchons, ben non. Mais j’ai encore la possibilité de donner plus tard, quand je n’aurai plus qu’un partenaire sexuel stable. Parce que je suis hétérosexuelle donc je suis exempte de tout reproche.


A côté de ça, nous avons un homo. Peu importe qu’il ait un partenaire régulier et un comportement responsable. De toute façon, il est gay, il couche forcément avec la planète entière et sans capotes. Bravo l’ouverture d’esprit Mme Bachelot (tout comme vos conseillers). Figurez-vous que les comportements sexuels dangereux ne sont pas l’apanage des gays et d’ailleurs, si vous regardez les chiffres du SIDA, c’est surtout chez les hétéros qu’il s’étend. Faut dire que quand l’élite de notre société, les gens qui nous gouvernent et ont fait des milliards d’études continuent à véhiculer des clichés du genre homo = risque très élevé de séropositivité, faut pas s’étonner que les hétéros ne se sentent pas concernés. Alors que si, tout pareil. Hypothèse : demain, je couche avec un mec sans capote. Mettons qu’un an plus tard, je décide de faire un don de sang et que j’ai un seul partenaire sexuel depuis les 6 mois réglementaires : je pourrai donner mon sang, même si j’ai pas fait de test HIV pour vérifier que M. Sans capote ne m’a rien refilé.

J’avoue que j’ai un peu honte sur le coup, honte de vivre dans un pays où même le fait de donner son sang est régi par des discriminations d’un autre temps. Surtout que c’est pas comme si on avait du sang à ne plus savoir qu’en faire… Je ne suis pas sûre qu’un excès de prudence tel que celui ci soit tolérable, vraiment pas. D’autant que c’est assez inquiétant pour la suite : si les homos n’ont même pas le droit de donner leur sang, je n’imagine même pas la question du mariage ou de l’adoption. Parce que cette décision montre bien que l’étiquette de dépravation collée aux gays reste tenace. S’ils ne sont pas assez responsables pour se protéger afin de donner leur sang, imaginez un peu, élever un enfant, mais quelle idée !


Ça me débecte. On est quand même en 2009… Les homos ne sont pas des inconséquents, pas plus que les hétéros. Pensez-vous réellement, Mme Bachelot (et votre clique toujours) que si un gay a un comportement à risque, il va se pointer l’air de rien à un don de sang ? Pensez-vous réellement qu’aimer une personne du même sexe que vous vous rend forcément dépravé, inconséquent, sans la moindre petite capote ? Pensez-vous réellement qu’être homo signifie forcément infidélité et baise à tout va ? Je vous présenterais bien des couples gays stables et fidèles mais quelque part, j’aurais l’impression de devoir justifier mon discours alors qu’il tombe juste sous le sens.


Finalement, il y a au moins un avantage à cette décision surréaliste : ça montre que malgré les discours de tolérance bienveillante, on est très très loin du compte. Les homos restent victimes de discrimination, c’est un fait. Finalement, on aime critiquer les Etats-Unis (enfin, plus maintenant, ils ont un président noir alors c’est wonderland) mais quand je vois les droits qu’ont les homos dans certains Etats, je me dis qu’on ferait bien d’en prendre de la graine.

EDIT du 23 février : A lire : Le don du sang, une urgence mais pas pour les homos

16 réflexions sur “Discrimination, en lettres de sang

  1. C’est effectivement discriminatoire , mais un homosexuel sur 5 est séropositif, selon les dires de la présidente d’Act Up.
    Étant donné qu’il y a cette période muette où le virus n’est pas détectable.
    C’est plus facile de refuser systématiquement certaines catégories de donneurs plutôt que de passer des mois à analyser un échantillon de sang.

  2. Dans le cas de du don du sang il est normal qu’il existe des discrimination pour un impératif de santé public.

    En lisant ton article je comprend que le sida se croît chez les hétérosexuels mais la proportion de séropositiif chez les homosexuels est bien plus élevé selon les statistiques.

    Je préfère que les nomres sanitaires soient élevé sur ce point plutôt que que de prendre des risque Cette discrimination peut être utile si elle permet de protéger les gens.

  3. Que les réponses de certains sont intelligentes.
    Comme quoi des fois y a rien à faire, la connerie s’accroche et aucun détergent, même du Nina++, ne peut en venir à bout.

    En tout cas, il y a un côté positif à tout ça : les homos ne se découragent pas et continuent à mentir sur leur sexualité pour pouvoir donner leur sang. Parmi mes amis, en tout cas, ils sont nombreux dans ce cas.

    Belle preuve d’amour du prochain, je trouve.

  4. En lisant l’article et les commentaires, trois questions me vienne:

    1) Comment sont établis les critères pour le don du sang?
    2) On parle du HIV, des MST, mais quid des maladies transmissibles de même et non encore détectées? N’oubliez pas que pendant longtemps le HIV a existé sans être identifié tel quel.
    3) Si on éliminait ce questionnaire, et que vous soyez contaminés par un virus quelconque, que se passerait-il si vous portiez plainte?
    cf affaire du sang contaminé entre autres. Pourriez vous avoir gain de cause parce qu’aucune précaution aurait été prise lors de la collecte?

    Réduire cette problématique à de l’homophobie me semble un peu cavalier, même si je comprends que les personnes ainsi exclues puisse en être génée.

  5. Je me sens obligé de réagir parce que pense que vous faites un amalgame délicat entre ce que vous savez et ce que vous croyez savoir…

    Je m’explique je suis chercheur, je bosse sur la propagation du HIV en Afrique Centrale et la transmission entre les grands primates.

    Je peux vous assurer que homo = risque accru de transmission HIV, c’est un fait scientifique surtout vérifié dans les pays industrialisés où le taux d’infection est nettement supérieur chez les homos que chez les hétéros (le taux de transmission de la femme vers l’homme est relativement faible par rapport à celui de l’homme vers la femme ou de l’homme vers l’homme). Ceci s’explique en partie par le fait que la sodomie occasionne dans 99% des cas des microtraumatismes (= mini-hémorragies) ce qui augmente le risque d’infection (quelle qu’elles soient: chlam, herpès, HPV, hépatites…)

    Par ailleurs, en Afrique, 38 pays sur 53 punissent l’homosexualité de la peine de mort, ce n’est pas vraiment le cas en Europe ni en France. Les codes ont bougé certes, mais plus rapidement chez nous que dans le reste du monde et il ne faudrait pas l’oublier. Je pense que vous devriez déjà être fier du fait que les choses changent. Pas assez vite je le reconnais, mais il a fallu près de 2000 ans pour donner le droit de votes aux femmes, alors estimez vous heureux.

    Je comprends votre ressentiment vis à vis d’une société dont les carcans bougent lentement mais d’autres personnes sont soumis à la même discrimination que vous (les anciens cancéreux -peu importe qu’ils aient une rémission totale, les amputés, les chercheurs en virologie -dont je fais partie-, etc…).

    Enfin, je finirai en vous disant qu’il y a effectivement un grand nombre de choses inconnues dans la persistance d’infection non décelable dans le sang (à l’heure actuelle) et que le principe de précaution n’est pas le meilleur mais il sauve des vies (j’ai fait partie des gens traités à la testostérone dans mon enfance, j’ai été transfusé, je n’ai pas chopé le HIV mais j’aurais pu parce qu’on a pas respecté ce principe…et d’autres sont morts depuis à cause de ce « détail »).

    Comprenez que je soutiens votre cause et que j’aimerais que la société avance plus vite qu’actuellement (regardez les conneries que nous a encore sorti Benoit XVI sur l’homosexualité, hein ?) mais rappelez vous qu’il faut du temps…
    Amicalement,
    Gizmo

  6. Mais parce que justement c’est un critère…la sexualité. Epidémiologiquement, les homos sont plus à risque que les hétéros, c’est tout. On a beau dire que les statistiques on leur fait dire ce qu’on veut, c’est une réalité. Le prinicpe de précaution on fait pareil avec les OGM (c’est pas bon , c’est dangereux…etc: au cas par cas non, globalement y a des trucs pas nets). Au final, on tranche dans la masse faute de mieux pour le moment.
    Au fait que savez vous du don du sang en Allemagne, en Espagne ou au Royaume-Uni ?
    Quant à dire que la France est nettement en retard par rapport aux autres pays en matière de discrimination sexuelle, je ne m’avancerais pas trop là-dessus…
    Gizmo

  7. c’est quoi ton opignion sur l’offensive israelienne sur la bande de Gazza, et les ballons envoyés aujourd’hui sur le ciel de Gaza sous forme de jouets qui explose au toucher et qui dés la premiére minute 2enfants morts??

  8. Si c’est à moi que la question est posée, je dirais que ça me regarde, ce n’est pas l’objet du post.

    Je lis tout ce que vous écrivez ici, pardon pour la confusion avec Bobby (je crois ?), je n’avais pas fait attention sur l’auteur.

  9. Comme j’ai pas donné mon sang depuis des années je viens de comprendre beaucoup de choses.

    Le questionnaire sert uniquement à mesurer un risque. si tu as déconné Nina (j’aime pas ce terme que tu as employé) avant les six derniers mois ils estiment qu’il pourront refouler ton sang si il impropre car ils sont persuadés que le test sur l’échantillon prélevé sera suffisamment fiable.

    La vrai bonne question à poser dans un questionnaire mais que personne ne peut vérifier c’est : « est-ce que votre partenaire a papillonné avec quelqu’un d’autre que vous au cours des 6 dernier mois? »

    Par ailleurs si dans les chiffres que mentionnent Nina (si ces stats ignorent les bisexuels ) alors la progression entre hétéro et homo sont pratiquement identique (48 % proche de 52%). Comme la proportion des séropositif est bien plus important chez les homosexuel alors le risque d’erreur du test de l’échantillon est bien plus important.

    Il me semble que les personnes âgés de plus de 65 ans n’ont pas le droit de donner leur sang. Cette mesure discriminatoire vis à vis des vieux est-elle pour préserver leur santé ou parce que le corp médical estime que leur sang est peu viable?

    J’avais eu connaissance d’une discrimination sur le don du sang en Israel. Le sang des béta Israel (falasha juif noir d’Ethiopie) était prélevé mais mis de côté est jamais redistribué. Sans spéculer Je suis sure que d’autres pays appliquent ce genre de discrimination.

  10. « Que les réponses de certains sont intelligentes.
    Comme quoi des fois y a rien à faire, la connerie s’accroche et aucun détergent, même du Nina++, ne peut en venir à bout. » Bobby

    Quel est l’intérêt d’insulter quelqu’un, sans réfléchir au pourquoi d’un tel raisonnement ?
    Et sans même apporter son propre raisonnement …

    Se forger une idée, sur de l’émotion et des sentiments, cela peut-être très dangereux.

    Lors d’un séjour au Canada, j’avais voulu donner mon sang, et on m’a indiqué que puisque j’avais vécu en France pendant la période où les vaches étaient folles, je ne pouvais le faire.
    Je ne me suis pas pour autant senti victime de xénophobie anti-français.

    Le problème, c’est que la communauté gay se bat régulièrement pour obtenir les mêmes droits et le même respect que les hétéros.
    Donc on en conclu rapidement que c’est encore une forme d’exclusion.

    Sauf qu’on est obligé de jouer avec les probabilités, pour limiter les risques, même si les choix sont arbitraires et que cela apparaît injuste, car le critère est une forme de sexualité.
    C’est pour cela que je pense que c’est effectivement une discrimination, mais qu’il faut surement en passer par là, pour éviter que les risques augmentent, sachant que les contrôles ne sont pas systématiques.

  11. Quelques reactions de lecteurs me font un peu frémir 🙁
    Mais ce n’est pas cela qui me fait le plus peur, mais oui il y a un risque non quatifiable qu’une personne infectée par ce virus donne son sang lors de sa sero-conversion, et ensuite, il faudrait que ce sang soit transfuser, et enfin qu’il contamine le patient receveur (c’est loin d’etre a tous les coups, fort heureusement), donc les risques pour qu’un homo en sero-conversion « contamine » un receveur est proche de nul s’il ne l’est pas ! par contre ce qui me fait plus peur c’est qu’eninterdisant le don a des groupes de personnes suceptibles d’etre soi-disant plus a risque, les centres de transfusions se conrantent du fameux questionnaire et que l’on restreigne les tests sur des personnes sans risques suposes, eh la, c’est ca qui fait vraiment peur.

  12. Oui mais c’est surtout s’ils commencent a faire confiance a leur foutu questionnaire pour economiser quelques tests, car 6 mois a mon avis ca ne veut carrement rien dire, on n’a vu des couples sero-differents le rester apres des annees d’activite sexuelle normale, puis plein d’autres choses vienneent en ligne de compte !
    Qu’ils continuent a faire des tests sanguin pour TOUS les dons et meme si les gens leur semblent clean, et surtout que les politiques arretent les stigmatisations pour faire passer leur saloperies !

  13. ça commence a dater un peu cette discussion mais je la découvre maintenant…elle a le mérite de soulever des tas de reactions, preuve que le sujet passionne plus que de savoir si on devient célebre apres sa mort…moi je suis né sans cette omni presente notion du SIDA, insouciant quoi, pur produit des sixties, et j’avoue que faire l’amour avec un presevatif m’a toujours posé un pb (technique et psychologique : jamais été capable de mettre ce foutu machin, et comme tue l’amour, je ne vois pas mieux…et pourqupi pas s’embrasser avec un masque aussi ?) mais plutot qu’un questionnaire aussi débile qu’inefficace, pourquoi ne font-ils pas SIMPLEMENT une detection HIV avant le don de sang, quel que soit les donneurs…??? donner suppose une certaine motivation, quitte a devoir attendre ces tests toujours « interessants » a connaitre en plus. Ca supprimerait toute discussion relative a la déviance communautaire de ce genre de décisions.

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