Le prix du chômage

Un entretien, ce n’est pas rien quand on est au chômage : c’est une lueur d’espoir. Alors je l’ai déjà dit, on le prépare pour être au top. Mais ce dont on ne parle pas forcément, c’est de son coût. Parfois, ça peut coûter cher. Illustrations (au pluriel, oui, oui).

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Avril 2007, le 11 précisément. J’ai décroché deux entretiens dans la journée, si, si. Le premier au fin fond du XVe à 11 heures et le second au fin fond de la ligne A du RER à 15
heures. Oui, je suis un peu une warrior quand je m’y mets. Alors je vais à mon premier entretien, je sors vers midi alors autant vous dire que je n’ai pas le temps de rentrer chez moi pour déjeuner donc je m’arrête vers Montparnasse manger un repas sur le pouce. 10 euros. Ajouté aux 9 euros de RER puisque je dois aller péter en zone 5 plus encore 3 euros de bus pour atteindre ma destination finale. 22 euros. Et je me vois mal aller à l’ANPE pour réclamer le remboursement de mes trajets pour de si petites distances. J’aurais pu avoir le même problème quand j’étais allée passer un entretien au fin fond des Yvelines mais j’ai grugé le bus, j’ai juste dû payer mon aller-retour zone 5. Autre exemple : mon entretien chez TGGP. Souvenons-nous, à l’époque, comme j’étais un tout petit peu intimidée à l’idée de travailler pour le site du mag féminin de grand standing. Du coup, pour passer l’entretien, je me devais d’être hype. Je me suis donc achetée une tenue pour l’occasion.

Il est vrai que la recherche d’emploi, ça coûte quand même de l’argent. Quand on a un accès illimité à Internet, ça va, on peut candidater à moindre frais. Parfois, il faut envoyer
des CV par courrier, comme demandé sur les annonces. Sans compter le book, ça s’imprime, ça se relie… Et les fringues pour les entretiens. Et encore, moi, je suis une fille, je peux trouver un tailleur à pas trop cher alors qu’un homme… Et tous ces frais là, on nous les rembourse pas. Déjà pour les transports, accrochez-vous alors aller à l’ANPE pour se faire son budget fringue, on va vous rire au nez. Or nous n’avons déjà pas de pouvoir d’achat car pour pouvoir vivre décemment avec le RMI, faut déjà pas vivre à Paris vu qu’un loyer moyen dépasse largement ce petit pécule. C’est mieux que rien, ok mais aujourd’hui, j’ai parfaitement conscience que si mon père ne gagnait pas aussi bien sa vie, je n’aurai jamais pu rester vivre en région parisienne. Et dans ma ville natale, niveau médias, c’est un peu pauvre…

Alors évidemment, la solution en attendant, c’est le boulot alimentaire. A un moment, j’ai envisagé de postuler au Starbucks parce que ça sent meilleur que le McDo et y a pas mal
d’étrangers, ce qui m’aurait permis de parler anglais. Je n’aurais pas vraiment pu le mettre sur mon CV, c’est pas tip top cohérent avec mon parcours. De plus, le travail alimentaire, même s’il permet de vivre en attendant, ça prend du temps et ça ne facilite pas les choses pour candidater correctement et surtout passer des entretiens. J’ai toujours eu peur du travail alimentaire, pas tellement dans sa dimension travail, hein, mais peur d’une situation qui perdure. Quand je bossais à la Poste, par exemple, je faisais mes 35 heures réglementaires et si j’aurais pu envoyer des candidatures le soir, pour caser des entretiens, bon courage. Surtout que je pense qu’un employeur doit être ravi de voir qu’une de ses employées prend des RTT pour passer des entretiens ailleurs. Et puis on sait ce que c’est : on gagne un salaire, on rentre fatiguée le soir et la situation s’étale dans le temps. Un mois, deux mois, trois mois… Mince, ça fait déjà un an. Dois-je renoncer à mes rêves ? Non parce que si je voulais faire un boulot alimentaire à vie, j’aurais pas fait d’études et j’aurais gagné quelques années. Là, j’en serais déjà à 10 ans de carrière presque, je serais plus en bas de l’échelle…

En attendant, on peut toujours accepter des stages rémunérés mais pour ça, il faut des conventions et vaut mieux s’inscrire à la fac vu que l’ANPE n’en délivre quasiment pas. Sauf
que la fac, c’est pas gratuit non plus. A mon époque, c’était en moyenne 300 euros pour les premières années, 800 pour le master pro. Plus que mon loyer. On se moque souvent de la génération Tanguy qui vit aux crochets de leurs parents mais franchement, j’ai beau poser l’équation dans tous les sens, un chômeur, c’est un gouffre financier. Quand je vois combien je coûtais à mes parents, je suis quand même gênée. Plusieurs fois, j’ai envisagé de rentrer dans mon sud natal pour ne plus leur coûter si cher. Plusieurs fois, on m’a répondu que c’était pas là-bas que je trouverais du boulot dans ma branche. Certes mais si mes parents n’avaient pas eu les moyens, je n’en serais pas où j’en suis aujourd’hui.

14 réflexions sur “Le prix du chômage

  1. mince Nina, je commence à vraiment aimer ce que tu écris !

    rien à redire à ton billet, si ce n’est un conseil : mettez de l’argent de côté, bande de petits salopiots ! dès que vous pouvez ! et dites-vous que le produit que vous achetez est moins cher dans un autre magasin à un autre moment, dc attention au coup de coeur, ou aux courses le ventre vide ;-p

  2. L’argent est roi dans ce monde, et meme moi j’ai eu ce genre de probléme, et j’ai culpabilisé de dependre de mes parents et de leur faire dépenser de l’argent, mais je crois que j’aurais fait la meme chose pour mon enfant, donc, je suis d’accord avec le commentaire de Yves, il faut toujours mettre de l’argent de coté, meme si comme moi, tu n’es pas une grande depensiére (pas de folies), mais on ne sait pas de quoi demain est fait, et puis sait t on jamais, si demain tu as un enfant, ben pense à preparer de l’argent, pour le soutenir comme tes parents l’ont fait avec toi,
    bon courage

  3. bien résumé le coté « job alimentaire » où on se rend compte que ceux qui n’ont pas fait d’études et font le même taf partent avec des années d’avance paradoxalement, finalement si on est pas dans une formation pro qualifiante, les études c’est pour la gloire.

  4. Ben carrément, ma maîtrise d’histoire, elle sert surtout à décorer les toilettes (non, en vrai, je l’ai pas affichée). Quand tu vois les salaires d’un plombier ou d’un électricien qui bossent bien, tu te dis que le bac++, c’est pas la garantie d’un meilleur salaire!

  5. Moui, je fais effectivement un job « alimentaire » devant un ordinateur toute la journée, sous-passionnant, bien payé mais j’ai la chance d’avoir des horaires qui me laissent le temps de chercher quelque chose qui me corresponde. Dans mon cas, je n’ai pas beaucoup d’alternatives car je recherche un travail à l’étranger, donc je ne fais que du e-job seeking. D’ailleurs si vous avez des pistes…
    Sinon, je suis à 100% d’accord avec toi, le chomage actif (c.a.d. la recherche d’emploi) est chère, toujours trop longue et pénible. je préfère de loin écourter une soirée parce que je me lève tot le lendemain et/ou que j’ai du travail qui m’attend à la maison, que faire la fete (sauf si c’est à 4 pattes) toute la nuit parce que le lendemain, je peux compulser les offres de travail à toute heure. Cette phrase est un tantinet longue humm ?

    Pour l’anecdote : je me suis rendue hier à un salon sur l’emploi international. J’aurais du y avoir 2 entretiens, je n’en n’ai eu qu’un (le 2e type n’a meme pas eu la décence de se montrer, les organisateurs étaient en rogne). Cet entretien s’est très bien passé, le poste est intéressant etc… Mention spéciale pour ce bonhomme à la 50aine bien tapée qui m’a draguée pendant 20 min.
    Alors non, chercher un emploi c’est vraiment pas marrant. En plus il avait une haleine de café clope si tot le matin, Bordel Tic Tac c’est un tourbillon de fraicheur pour seulement 2 calories, c’est pas fait pour les bulots !

    oui, ce commentaire est un peu long. je vais me taire, là.

  6. j’en suis arrivé à penser que bien qu’il soit toujours utile d’avoir des bases de connaissance et de cultures solides, qu’on peut les acquérir à l’école mais aussi à l’extérieur, il faut peut être laisser un jeune choisir de travailler après le bac ou faire une formation directement plutôt que de pousser à la réussite universitaire (« il faut un bon diplôme pour avoir un travail » c’est dépassé). Quite à reprendre des études par la suite selon les envies, c’est souvent aussi formateur de se confronter au monde du travail pour savoir ce que l’on veut.
    Bon c’est un peu éloigné su sujet qui est les dépenses du chercheur d’emploi!

  7. Ouais mais c’est intéressant. Si on doit compter sur l’école ou la fac pour nous constituer une culture, c’est assez navrant. Ca veut dire qu’une fois qu’on a fini, on est condamné à végéter??? Finalement, moi, mon taf actuel, je l’ai pas appris en cours, je l’ai appris sur le tas.

  8. ce que je voulais dire c’est que la culture que l’école t’apprends tu las choisis rarement, c’est facile d’être balèze sur un sujet qu’on aime, là tu dois parfois te forcer à découvrir d’autres formes de cultures. Fin de l’apparté.

  9. Sous l’Ancien Regime, precisement apres l’encastellement et la reaction seigneuriale (en gros du 8e au 13e, meme si selon les regions les dates changent un peu) le petit paysan etait juridiquement (loi non ecrite, coutume fait force de loi) rattaché a sa terre. S’il n’en etait pas proprietaire (le payement d’impot reconnaissait la proprieté su seigneur) il en etait tout de meme le total gerant et pouvait donc la faire fructifier, la vendre, en racheter de nouvelles… A coté de cela, le seigneur necessitant toujours des gueux sur ses terres la loi d’attachement est vite devenue hereditaire. Le fils du paysan d’un lopin etait donc destiné a travailler lui meme ce lopin, ce qui arrangeait donc le seigneur pour la raison vue precedemment. Mais ca arrangeait egalement ledit paysan car ca lui permettait de travailler dans la vision d’un futur qui le depassait, pour son gosse. Pour lui apporter une meilleur condition que la sienne.

    Tout ca pour dire qu’en gros le fait que les parents se saignent pour leurs gosses ne date pas d’hier, que le fait que les enfants aient du mal a se lancer dans la vie active non plus, et que tout cela ne paraisse pas profondement anormal encore moins.

    Petite precision, les recensements ont commencé a partir du 16e, donc pas de chiffres vraiments precis avant, mais a l’epoque l’age moyen du mariage pour les miss (et donc de l’entrée dans ce qu’on peut appeler anacrhonologiquement le monde du travail) etait de 26 ans. 27 dans certaines regions. Encore une chose qui ne date pas d’hier.

  10. 2Bastien > 26, 27 ans pour le mariage au XVIe sciècle ça me parait tardif vu l’espérance de vie de l’époque assez courte si je ne me trompe pas

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