Les garçons et Guillaume, à table ! de Guillaume Gallienne

Il est des films dont on se méfie doublement : de un parce que tout le monde a adoré et de deux parce qu’on a vu son acteur tellement partout qu’on a limite l’impression qu’on vit avec. Du coup, je ne me suis pas précipitée voir « Les garçons et Guillaume, à table » mais puisque ma mère l’avait en DVD et qu’il n’y avait rien d’autre à la télé, matons cet OVNI.

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Ca commence par une scène. L’artiste entre. Un one man show insolite où l’homme évolue dans un décor de chambre, on ne devine pas le public, il est seul. C’est l’histoire de Guillaume, petit garçon un peu différent persuadé d’être une fille. Et cette idée lui plaît. Il est flatté de danser la Sevillane comme une fille, il est passionné par les éventails et ne vit que dans le mimétisme de sa mère, une bourgeoise agacée et de mauvaise humeur au langage fleuri. Guillaume va donc grandir en se pensant fille puis en se pensant homosexuel vu que tout le monde en est persuadé. Même si lui ne se définit pas comme tel : une fille qui tombe amoureuse d’un garçon, on fait difficilement plus hétérosexuel, non ?

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Guillaume Galienne raconte son histoire. Sur le papier, cet exercice « légèrement » nombriliste fait peur. Oui, on ne parle jamais mieux que de ce qu’on connaît mais je suis pas sa mère, à ce garçon, j’aurais peur de me retrouver au milieu d’une sorte de règlement de compte mère-fils. Le lavage du linge sale en famille, ce n’est pas que pour préserver la dite famille, c’est aussi pour éviter de gêner les personnes tierces qui n’ont rien demandé et qui préfèrerait ne pas être là en ce moment, merci. Mais en fait, non, cette autobiographie, c’est autre chose. Une succession de sketches sur ce garçon qui se sent fille et qui va grandir avec ça. Des moments drôles, des moments touchants, des moments où on se demande un peu ce que ça fait là (j’ai pas compris le passage de la cure si ce n’est que ça permet de mater le cul parfait de Diane Kruger moulé dans une blouse d’infirmière et j’ai trouvé ce passage assez vulgaire et lourd). Les acteurs sont impeccables, le film se laisse voir dans la bonne humeur.

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Reste la question de fond : en posant le petit Guillaume comme un « hétéro refoulé », dirons-nous, ne plonge-t-on pas dans une sorte d’homophobie ? Pour moi, la réponse est clairement non même si on ne nous épargne aucun cliché sexiste : dans cette comédie, les hommes sont virils, aiment le sport et sont un peu brutasses, les femmes sont raffinées, comédiennes, elles aiment la danse, l’élégance et la compagnie d’autres femmes. Il en va ainsi pour Guillaume qui ne vit qu’à travers les femmes (les personnages masculins sont plus que secondaires) et les imite dans leur frivolité. Evidemment, les comédies reposent toujours sur ce type de clichés mais ça agace un peu. Un homme frivole est-il forcément gay ?
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Au-delà de ça, reste la question de l’identité, assez forte dans cette comédie : Guillaume est cet être fascinant qui est ce qu’on lui dit d’être, en fin de compte. Sa mère voulait une fille, il se comporte comme tel. Sa logeuse espagnole veut lui apprendre la danse, il ne se pose même pas la question de ses propres envies. Tout le monde pense qu’il est gay, il va donc tenter de coucher avec des hommes (et se retrouver dans des situations improbables. Vision négative de l’homosexualité ou volonté du cinéaste d’illustrer le malaise de son personnage face à une sexualité qu’il n’assume pas ?). Chez les psys, il se laisse balader et quand, enfin, il s’affirme par une crise de colère, il s’excuse platement quelques instants plus tard. Car dans ce film, le grand absent, c’est Guillaume. Il n’existe que par mimétisme. Qui est-il ? Une pâle copie de sa mère. Que veut-il ? Rester dans son ombre. Si, au début du film, il exprime clairement une envie (le voyage en Espagne), il subit les envies des autres tout le reste du film, navigant de pension en pension sans bien comprendre ce qu’il fait là, par exemple.
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Bref, je pense que l’erreur serait de prendre ce film pour ce qu’il n’est pas : un plaidoyer pour les troubles de l’identité, pour avoir le droit de ne pas être viril quand on n’est pas hétéro ou ce que vous voulez. Ca reste une comédie avec quelques bons mots. Et surtout, ce que j’en retiens… c’est que je dois aller m’acheter des éventails, c’est quand même un accessoire démentiel (je crois que depuis mon voyage à Barcelone, je suis branchée sur l’Espagne).
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