Choisir, c’est renoncer

Johann, réunion du 17 juillet 2012

Il y a des phrases qui vous frappent, comme ça, qui retentissent en vous tel un coup de tonnerre et vous décroche de la conversation. À peine les mots ont-ils pris leur envol que vous les saisissez pour méditer dessus, quitte à ne pas écouter ce qui suit. En général, ce qui suit vous concerne et vous vous sentez un peu con quand raisonne soudain un « n’est-ce pas Nina ? » que vous ne raccrochez à rien. C’est ainsi que certains furent mutés à Tulsa.*

Mais revenons à cette sentence puissante. Plus qu’un slogan de marketeux, une citation philosophique. Tu pourrais mettre Jean-Paul Sartre derrière que ça passerait inaperçu dans une copie de philo. Bon, en vrai, c’est André Gide mais je me demande si certaines citations mal attribuées peuvent échapper à la sagacité du correcteur… Ça me ramène à un concept que j’adore : l‘univers des possibles dont j’ai déjà parlé. Au fur et à mesure que je choisis un possible, d’autres se ferment ou s’éloignent. Le jour où j’ai choisi le community management, je me suis éloigné du possible journaliste jusqu’à le rendre aujourd’hui quasi inatteignable (sauf piges mais pour ça, faudrait-il que j’entame des démarches, ce que ne fais pas). Le jour où j’ai choisi mes études, j’ai aussitôt rendu inaccessible certains métiers. Enfin, rien d’impossible en soi mais si demain, je veux devenir psy, faut que je reprenne tout de zéro, recommencer des études… Pas impossible mais pffff quoi… Si demain, je veux devenir comptable, avocat ou graphiste, je ne peux pas juste envoyant des CV, il y a un travail de formation mais aussi de négation de ma carrière actuelle. 5 ans foutus à la corbeille ? C’est anti théorie de l’engagement.

Et que dire des amours ? Si j’elis Jon en temps que M. Bartoldi officiel, je renonce de fait aux autres hommes. Oui, je sais, la monogamie n’est pas une fatalité mais même dans les versions les plus libres de l’amour, il n’y a toujours finalement que deux personnes au départ. Un noyau dans lequel nul autre ne pourra pénétrer, juste graviter autour.

Ce renoncement, dont nous n’avons pas toujours conscience, est le meilleur ami de la peur de l’engagement, il en est même le ciment. Puisque s’engager, c’est choisir et donc renoncer, tout retour en arrière sera soit impossible, soit douloureux. Après tout, qui aime revenir en arrière ? Admettre qu’on s’est trompés est plus une constatation et une légère bifurcation du chemin que l’on prend. Mais quand on est trop engagés sur une voie, il serait plus long de retourner au début que de continuer malgré tout.

Choisir, c’est renoncer. Mais arrive un moment où on n’a plus le choix, justement. Stagner n’est pas une possibilité envisageable. Je suppose qu’en un sens, choisir, c’est être adulte. Tout simplement.

* Oui, près de 10 ans après la fin de la série, je fais encore des références à Friends parce que si je faisais le même clin d’oeil avec des telenovelas, je serais la seule à comprendre.

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