Où est la survie du journalisme papier

L’autre jour, le vendredi 26 juin très précisément, j’avais rendez-vous pour d&jeuner en ville avec un pote. En cheminant, je croise le panneau suivant du Parisien : « Exclusif : Michael Jackson est mort ! ». Réflexe : super, paie ton exclusivité, ça fait 3h que tout le monde me saoule avec Michael Jackson, au point même que l’idée d’écouter une seule de ses chansons à l’heure actuelle me donne la nausée. Oui, le moutonisme émotionnel me fatigue car je me demanderai toujours si tous ces gens qui criaient leur peine sur FB ou twitter avaient ne serait-ce qu’un titre du chanteur sur leur ipod et s’ils avaient pensé à lui durant les 3 années précédentes. Je n’en suis pas sûre.



Bref , je souriais à cette exclusivité mais il est vrai que la plupart des titres parlaient de la mort de Farrah Fawcett, Michael étant mort plus tard dans la soirée, les journaux étaient déjà sous presse. Alors que les internautes se gargarisent d’avoir eu l’exclu et battus les journalistes (on ne parlera pas ici de tous les fakes qui ont circulé sur twitter, la moitié des people sont morts cette semaine là grâce à eux… ahem…), je me suis posée la question : et si cette extrême rapidité de l’info sauvait la presse papier en la transformant ? Oui, moi, j’y vois carrément une solution positive à tout ça.


Partant du principe que le pire travers du journalisme est la course au scoop, Internet est aujourd’hui le meilleur moyen d’évacuer cette dimension de la presse papier. Prenez n’importe quel journal en ligne, ils ont tous annoncé des conneries, tous. Internautes zélés vs journalistes web sous pression : égalité. Je me souviens y a une dizaine de jours que Le Monde annonçait en une qu’on avait retrouvé la boîte noire de l’AF447, faux ! Aucune rédaction n’est à l’abri. C’est sans doute mal mais j’y reviendrai une prochaine fois dessus, là n’est pas le sujet. Toutes les infos chaudes-brûlantes étant disponibles limite en temps réel sur le web, pourquoi ne pas les évacuer totalement du papier pour ne laisser la place qu’aux analyses poussées, aux éditos et chroniques ? Evacuer le factuel pour aller au-delà ? Après tout, qui achète les journaux aujourd’hui pour n’avoir que le factuel, disponible sur le web et dans les gratuits ? Ah, évidemment, bon argument qui tombe : tout le monde n’a pas le net ou les gratuits. C’est vrai. Ceci étant, soyons fous, imaginons le modèle suivant : prenons le Matin plus, par exemple, co financé par le Monde et Courrier International qui était mon chouchou à l’époque. Oui, depuis, j’ai déménagé et je n’ai plus de gratuits dans ma gare de départ, seulement dans celle d’arrivée mais comme je ne sais pas encore lire en marchant, ça ne me serait guère utile. Bref, peu importe. Imaginons donc que chaque exemplaire du Monde soit vendu avec son petit Matin plus avec d’un côté un cahier bref et factuel, de l’autre, de vraies analyses.



Ce qui me navre dans le journalisme d’aujourd’hui, c’est la surenchère émotionnelle et le brodage sur du vide. J’avoue lire de plus en plus la presse en ligne et de moins en moins la presse papier (c’est mal) mais quand je vois qu’on est capable de tirer un papier de 2 000 signes sur le moindre débris trouvé (ou pas d’ailleurs) de l’AF447, qu’on est capable de publier une photo de tache d’huile flottant sur l’océan nous expliquant que c’est le lieu du crash (alors que non)… Bref, par moment, j’ai juste envie d’hurler stop. Bien que ça m’inspire, cette surenchère émotionnelle et pas qu’un peu, j’en reparlerai d’ailleurs (je suis chiante à annoncer des dizaines d’articles que je vais peut-être oublier d’ailleurs). Seulement émotion et journalisme, arrive un moment où ça coince. Parce qu’on va tellement fouiller les poubelles, tellement courir après la moindre bribe d’émotion qu’à la fin, on publie n’importe quoi. Et quand on est pris la main dans le sac, on colle un petit démenti mais s’excuser, non mais ça va oui ? On travaille dans l’urgence, nous, on n’a pas le temps de vérifier nos sources. Tu crois qu’ils le font à la concurrence, non mais !




Bref, je rêve d’un journalisme papier réfléchi et analytique, moins dans l’émotion, la surface, l’urgence. Evidemment, ça ne veut pas dire que le journalisme Internet est forcément mauvais. Je suis une fan convaincue de Rue89 (et de ses commentateurs plutôt fins dans l’ensemble, j’ai toujours envie de leur faire des bisous).

Une révolution est à faire et ça fait un moment qu’elle est nécessaire. Mais qui osera franchir le pas ?

7 réflexions sur “Où est la survie du journalisme papier

  1. ouais t’as raison, tous des menteurs ces journaleux … l’autre jour, je lis page météo (la seule page que je lis à ma pause journalière) WE beau et ensoleillé, du coup je prévois marcel, short de bain et indice 40 : résultat flotte et chaleur lourde…je dis halte au mensonge climatique médiatisé…d’un autre coté, je songe à déménager vers des iles ou des filles alanguies tressent des colliers de fleurs m’a t-on vanté…sans internet et sans journal télevisé. signé Fletcher Christian.

  2. Très bon article! Peut être a tu également lu le dossier spécial presse dans courrier international le mois dernier. La presse papier se meurt en France, et c’est bien dommage. Les gens prennent de moins en moins le temps de lire les journaux. Internet n’a fait qu’aggraver le problème.Ton idée est bonne, mais dans notre société McDo/MTV, les gens veulent tout, tout de suite. Lire, c’est long, c’est chiant(mode Louka activé). Je crois que le format papier a du soucis à se faire, même si j’ai rien à proposer pour changer ça.

  3. ouh la la … tu n’as pas l’air d’apprecier mon humour du lundi matin…bon on peut pas plaire à tout le monde…bonne apres midi quand même.

  4. Moué, je préviens tout de suite je vais faire un peu un hors-sujet tu supprimeras si tu veux Nina mais là je suis un peu énervée…

    Perso ce qui me choque, c’est pas d’entendre 10 fois la même info, je dirai même que je le recherche, toute façon je suis une droguée de l’info, quand un truc m’intéresse je vais lire tous les articles que je trouve et zapper entre BFMTV et Itélé…toute façon quand j’étais gamine j’écoutais France Info en boucle donc entendre 10 fois la même chose ça me fait rien (oui je sais écouter France Info en boucle à 10 ans ça peut expliquer beaucoup de choses…).

    Nan moi ce qui me choque au moment où j’écris ces lignes c’est le tri qui peut être fait dans les infos, genre découvrir en lisant un mini-entrefilet dans 20 minutes une agression dont je n’ai pas entendu parler du we alors qu’elle a eu lieu vendredi aprem…agression dont si les agresseurs et les victimes avaient été inversées, on nous aurait abreuvé tout le we et cette semaine encore…comme quoi la presse MacDo/MTV ça a du bon parfois…

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